Créer un site internet

 

Taglioni explique le pourquoi du desmo



Mais qui mieux que le maître en personne peut nous exposer le pourquoi et le comment du desmo ?
Voici le texte traduit d’une conférence de Fabio Taglioni:  

 

 

     Taglioni précise les raisons d’un choix dont il ne s’est jamais départi.

"Je tiens à préciser un concept fondamental, afin d’effacer une fois pour toute des esprits, les interprétations erronées qui ont été données aux raisons qui m’ont conduit, il y a de cela quelque trente ans, d’équiper les moteurs de la Ducati 125 de GP d’une commande desmodromique. D’aucun ont prétendu qu’il s’agissait de repousser, en termes de diagramme et de régimes de rotation, les limites que les ressorts de l’époque imposaient. C’est faux : dans les années 50 de bons aciers pour ressorts, de haute technologie et de grande efficacité, existaient déjà (à l’époque de l’apparition de la Ducati 125 Desmo, grâce à ses activités aéronautiques et ses contacts aux États-Unis, Augusta utilisait des ressorts américains). Les Ducati Desmo tournaient ainsi à des régimes de plus de 13 000 tr/mn, et les MV devaient atteindre les mêmes limites. Ce qui prouve bien que la qualité des ressorts était réelle.) D’autre part, si les soupapes ont tendance à " s’affoler ", la faute doit en revenir au concepteur qui n’a pas su tenir compte des accélérations. C’est précisément là où la moindre erreur est lourde de conséquence. Après calcul des accélérations des soupapes des moteurs la conclusion nous amène au besoin d’éliminer la source des inerties qui briment la force que la came est capable d’appliquer à la soupape dès l’ouverture : la précharge du ressort. En réalité, il est toujours possible de réduire les masses pour diminuer ces inerties, mais il ne faut pas oublier que la réduction structurelle des organes (poussoirs et soupapes) est conditionnée par leur résistance mécanique à la  force appliquée. C’est pourquoi il m’a semblé plus logique d’éliminer la précharge du ressort et d’utiliser une commande mécanique de rappel de la soupape. Si l’on connaît la résistance structurelle de l’ensemble soupape/poussoir, on connaît également la force qui peut y être appliquée. Admettons qu’elle soit égale à 100. Une moitié de cette force sert à vaincre l’inertie de la soupape, tandis que l’autre moitié est utilisée pour vaincre la précharge du ressort. Comme ce dernier doit surmonter à son tour l’inertie de la soupape en phase de fermeture, la valeur de cette inertie ne peut être supérieure à la force disponible. Ce qui fait donc 100 au total. En éliminant la précharge du ressort, sans altérer pour autant l’équilibre énergético-cinématique du système, il est possible de continuer à appliquer à l’ensemble poussoir/soupape une force de 100, cette fois-ci entièrement vouée à l’obtention de l’accélération maximale de la soupape à l’ouverture, en utilisant des profils et des levées plus poussés, au bénéfice du rendement. C’est sur ce point que le desmo est de loin supérieur à la classique application à ressort de rappel ".

Fabiotaglioni professor
 

Mais quelles sont en fait les limites du Desmo ? 

 
" Nous pouvons déjà en identifier une, qui est la nécessité d’opérer avec un culbuteur dont le jeu est pratiquement égal à zéro. Mais ce problème, je l’ai résolu rapidement par le montage d’un ressort hélicoïdal sous le culbuteur de fermeture. La configuration et les dimensions de ce ressort ne laissent aucun doute : le ressort ne participe que dans des proportions infinitésimales au travail de rappel de la soupape, pour la simple raison que sa charge n’est absolument pas conçue pour cela donc totalement inappropriée. Mais cette pièce est déterminante pour le contrôle des rebonds successifs de la soupape, dans le cas où le culbuteur aurait un jeu supérieur à 0. Ce ressort récupère en fait le jeu éventuellement existant et assure la parfaite fermeture de la soupape. Il a également pour fonction d’amortir les rebonds, à l’instar d’un amortisseur. Une deuxième limite est liée à la géométrie de la cinématique elle-même. La position des axes d’oscillation des culbuteurs ou des doigts par rapport à celle de l’axe de la soupape doit être calculée avec la plus grande rigueur, afin de prévenir que la tige de la soupape ne soit soumise à des poussées excessives. L’expérience m’a montré que la géométrie optimale consiste à faire travailler les deux culbuteurs suivant des axes qui forment un angle de 90° avec ceux de la soupape (au quart de la levée du culbuteur d’ouverture et au quart de la fermeture pour le culbuteur correspondant). Enfin, tout comme pour la force applicable à la cinématique commandant l’ouverture de la soupape, la force applicable à la cinématique commandant sa fermeture est tributaire d’une limite. Dans le premier cas, le maillon faible est constitué non pas tant par le contact came patin du culbuteur ou par les limites d’usure correspondantes que par le contact entre l’extrémité du culbuteur et le registre au sommet de la tige de la soupape. (Je me réfère là aux moteurs Desmo à deux soupapes dont je m’occupais), car une force excessive appliquée dans cette zone, où le contact affecte la forme d’une pointe, peut provoquer l’écaillage de la pastille du registre. Dans le second cas, le maillon faible est représenté par la bague de retenue du registre de fermeture et de la gorge aménagée dans la tige de la soupape. Une force excessive appliquée à ce niveau peut provoquer le tassement de la bague et la déformation de la tige. Et les choses empirent encore si le culbuteur de rappel ne travaille pas en équerre par rapport à l’axe de la soupape, car la force n’est pas appliquée sur la totalité de la circonférence de la bague d’arrêt, mais seulement sur une portion de celle-ci. Ce qui nous renvoie au point précédent : l’exactitude de la géométrie du Desmo. Je sais très bien que la conception d’un Desmo est loin d’être un jeu d’enfant, à vrai dire c’est la croix et la bannière pour réussir à le définir d’une manière correcte, mais c’est précisément cette difficulté qui doit " interpeller " un concepteur digne de ce nom. Un Desmo qui a été proprement dessiné DOIT présenter des taux d’usure des sièges de soupapes beaucoup plus faibles que ceux qui sont généralement admis sur un système de distribution classique. La simple raison en est que le contrôle du mouvement de la soupape est autrement plus précis et complet, s’effectuant instant après instant, fraction de degré par fraction de degré.
Si ce n’est pas le cas, il faut retourner se pencher sur sa planche à dessin ".