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Divers moteurs desmo 4 soupapes anciens
et les Ducati "desmoquattro" et "testastretta"
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La préhistoire du "desmoquattro":
Le monocylindre Ariès desmodromique:
En 1907, le baron Charles Petiet, l'ingénieur qui créa la Marque française d'automobiles Ariès, fit construire pour une voiturette de course, l'Ariès VT, un monocylindre 4 temps simple arbre à cames en tête à 4 soupapes. Il comportait une distribution desmodromique du type "box cam" (photo 1 et photo 2); elle était inspirée de deux systèmes américains brevetés en 1898 et comparables au système anglais Arnott de 1910.
Toutefois, le nom de l'ingénieur d'Aries qui l'a conçu est inconnu. Mais c'est peut-être Lefevre, en effêt en 1903 alors qu'il travaillait chez Aries, il a déposé un brevet pour un système de suralimentation (Arthur Michelat, l'ingénieur qui a conçu le moteur desmo de la Delage Type S de Grand Prix de 1914, a également collaboré avec Ariès, mais c'était vers 1910).
Un unique exemplaire de ce monocylindre Ariès a survécu incomplet mais en excellent état (il manque entre autres, le carburateur, les tubulures d'admission et d'échappement ainsi que le volant moteur); il est probable que ce soit un moteur de rechange.
Conservé longtemps par le famille du baron Petiet, il a été mis en vente aux enchères en 2014. Il a alors attiré la curiosité des experts qui se sont interrogés sur son mode de fonctionnement et de nombreux articles ont été écrits au sujet de ce moteur Ariès dans la presse spécialisée et dans des sites internet.
Du fait des pièces manquantes, il n'a pas été possible de faire démarrer ce moteur. Mais il n'est pas impossible que ce soit fait dans l'avenir après qu'il ait été reconstitué avec des pièces refabriquées.
(voir ce document "StradaConcamAries" très intéressant au sujet de l'Ariès VT de course et de son moteur)
(une galerie de photos de ce moteur et une video, voir aussi des informations et des photos de détail sur cette page du site Desmodromology)
Ce 1414 cc longue course (100 x 180 mm) suralimenté et techniquement très élaboré développait 16,5 hp à 1800 rpm et 20 hp à 2300 rpm dans une version plus poussée, une puissance élevée pour l'époque.
D'autre part, afin de loger de grosses soupapes (Ø 46 mm), le diamètre intérieur de la chambre de combustion était plus grand que celui du cylindre et l'angle entre soupapes s'établissait à 60°. La culasse d'une pièce avec le cylindre recevait 4 bougies réparties sur sa périphérie et le boitier d'allumage renfermant 2 rupteurs était placé en bout d'arbre à cames (une photo). Quant au piston, il ne comportait qu'un seul segment.
Afin de mieux comprendre le fonctionnement de ce moteur, les experts l'ont fait démonter et l'ont photographié en détail.
L'arbre de commande de la distribution par couples coniques comportait une denture à l'air libre qui entraînait un grand engrenage solidaire d'un distributeur rotatif. Il était en forme de cylindre avec de nombreuses petites lumières périphériques réparties sur trois hauteurs. Ce distributeur tournait donc plus lentement que le vilebrequin, c'est pour cette raison qu'il comportait un grand nombre de lumières. Noter qu'à part le cylindre borgne en fonte, les autres pièces de fonderie de ce moteur étaient en aluminium.
Ci-dessous, une photo de l'ensemble de ce système avec le carter de transfert entourant le distributeur, on le voit en gros plan sous le cylindre sur la photo de droite.
Ce dispositif de distribution très complexe placé sous le cylindre servait à réguler le système d'air d'admission qui était compressé par un système de carter-pompe.
En fait, l'air était aspiré dans le carter du distributeur rotatif à lumières multiples via une première tubulure, puis il était transféré vers le carter par une seconde tubulure, ensuite le mélange carburé était conduit vers la culasse et les soupapes d'admission au moyen d'une troisième tubulure. Le distributeur rotatif régulait ainsi à la fois l'admission et le transfert de l'air.
Par ailleurs, le cylindre comportait une lumière qui débouchait dans un canal, ainsi le piston jouait aussi un rôle dans ce système. Quant au carburateur, il était fixé sur le carter du distributeur. En fait, l'ingénieur qui a conçu ce moteur effectua un mélange comlexe de deux temps et de quatre temps.
De plus, pour améliorer le fonctionnement de ce système, il y existait un décalage angulaire entre la course montante et la course descendante du piston. Ce décalage était dû au fait que le cylindre était légèrement désaxé par rapport au vilebrequin.
(les shémas ci-dessous sont extraits de ce document pdf du site "Desmodromology" comportant des explications détaillées)
Enfin, ce moteur 4 temps était suralimenté par le fait que ce système de carter-pompe fonctionnait à chaque tour comme sur un 2 temps, ainsi ce sont deux volumes de carter qui étaient admis dans le cylindre à chaque cycle. De plus, afin d'augmenter le taux de compression du carter-pompe, son espace mort était réduit au minimum au moyen de bossages internes qui venaient entourer la bielle au plus près jusqu'à l'intérieur du piston (une photo).
En conséquence, le vilebrequin, le cylindre et le piston étaient lubrifiés par de l'huile mélangée à l'essence et le graissage de la distribution se faisait par barbotage dans un bain d'huile.
Remarque: ce moteur est un des rares 4 temps à carter-pompe avec le moteur desmo de Gottlieb Daimler conçu en 1885 qui comportait des clapets automatiques au niveau du carter et dans le piston (un dessin), ainsi que le mystérieux projet australien flat-twin EcoH 790 cc 80 hp de Ecoforce conçu par Paul Hallam (une photo d'un moteur brut de fonderie, une vue en coupe et le brevet). Voir aussi le projet de moteur parallel-twin de Costa sur cette page. Tombé dans l'oubli, il n'a pas dépassé le stade de prototype unique.
Mais tous ces moteurs on le même gros défaut que les 2 temps à carter-pompe, l'absence de graissage sous pression, donc une moins bonne longévité des pistons et du vilebrequin que les 4 temps.
la sources de ces photos: sites "Yesterdays" et "Desmodromology"
Un document pdf contient un article intéressant (mais en allemand) avec des photos ainsi que plus d'informations sur la conception et le fonctionnement de moteur, Il se trouve sur cette page sous le titre "StradaConamAriesverhaal"
(une fois ouvert, il est possible de le traduire avec Google Traduction, idem pour cet autre document en anglais tout aussi intéressant)
En 1908, Ariès construisit une voiturette ("cyclecar" en anglais) de course propulsée par ce moteur. Mais il était fragile et l'Ariès VT desmo ne brilla pas beaucoup en compétition. Une VT pilotée par Perrot se classa néanmoins en 3è place lors du Grand Prix des Voiturettes de Dieppe, mais il paraît qu'elle était propulsée par un moteur 1100 cc classique (photo ci-dessous).
(une page au sujet de la Coupe des Voiturettes organisée de 1906 à 1623)
Par ailleurs, l'Ariès VT est la première voiture de course de l'histoire équipée d'une distribution desmodromique. De plus, son moteur est le tout premier desmo à hautes performances.
En même temps, Ariès construisit un 4 cylindres 7,9 litres supercarré (160 x 98 mm) simple arbre à cames en tête qui délivrait 78 hp. Il fut conçu pour la CE, une voiture de course qui participa sans grand succès à quelques compétitions, elle souffrait d'un manque de mise au point (une photo de ce moteur).
Par la suite, Ariès construisit principalement des voitures de tourisme et de luxe ainsi des camions, plus faciles à vendre que les voitures de sport. Mais, trop petite pour lutter contre la concurrence des grands constructeurs comme Peugeot, Renault et Citröen, l'entreprise Ariès crée en 1903 fermera ses portes en 1938 après avoir produit environs 20000 véhicules en 35 années d'existence.
(voir aussi cette page au sujet de l'Ariès Type O Torpédo 4 cylindres en ligne 2,9 litres 14 hp de 1913 et une page au sujet de la Marque Ariès avec les modèles les plus connus)
Et contrairement à ce qu'on lit parfois, les moteurs V4 et V6 étroits montés sur des voitures commercialisées par Ariès n'étaient pas du type desmodromique, mais du type à soupapes latérales classique (voir ces dessins). Il y a confusion avec le monocylindre desmodromique (information confirmée par le site "Desmodromology"). De plus, ces moteurs V4 et V6 étaient construits par Aster, un équipementier de l'automobile qui fournit quelques moteurs à Ariès jusqu'en 1910.
La Delage Type S:
Le moteur 4 cylindres 4,4 litres double arbre à cames en tête 4 soupapes desmodromique de la Delage Type S de Grand Prix de 1914 (environs 115 hp à 3000 rpm), est l'oeuvre de l'ingénieur Arthur Michelat (à gauche sur la photo, avec Louis Delage à droite et l'ingénieur Duray au centre).
Mais sa mise au point s'avéra difficile, car le système avait tendance à prendre rapidement du jeu à cause de la fragilité des pièces de distribution. Á cette époque, les procédés de durcissement superficiel des métaux, comme par exemple la cémentation et la nitruration, étaient moins efficaces qu'aujourd'hui.
La Delage desmodromique participa à plusieurs Grands Prix sans jamais parvenir à s'imposer. À Lyon en 1914, lors du Grand Prix de l'Automobile Club de France, Delage engagea trois ypes S desmodromiques avec Bablot, Guyot et l'ingénieur Duray. Mais seul Duray finit la course et se classa en huitième place.
Pourtant, en 1916, une type S finit 5è aux 500 Miles d'Indianapolis et battit le record du tour en dépassant pour la première fois les 100 miles/heure de moyenne. Mais le moteur Delage cassa avant la course et il est probable que cette voiture était équipée en remplacement d'un moteur Miller Américain 4 cylindres 4,8 litres desmo 4 soupapes de 136 hp.
Il existe encore un unique exemplaire de la Delage type S desmodromique (photo ci-dessous). Elle appartient à un collectionneur australien qui l'a faite parfaitement restaurer. Á cette occasion, un exploit mécanique a été réalisé: le bloc moteur étant hors d'état à la suite d'une surchauffe, il a été scanné de l'extérieur et de l'intérieur pour confectionner un moule de fonderie et en faire une parfaite copie.
(plus de détails sur cette page et aussi sur cette autre page).
La Delage Type S comportait deux places, car à l'époque le pilote était parfois accompagné par un mécanicien durant les Grands Prix de longue durée.
Remarquer sur le figures ci-dessous, le système original constitué d'un étrier coulissant dans des guides et actionné par 3 cames (une d'ouverture et deux de fermeture) qui entraîne deux soupapes en parallèle et aussi la fermeture des soupapes "finalisée" par des petits ressorts de ratrappage de jeu.
Le dessin de détail qui apparaît sur la deuxième figure, a été réalisé d'après des pièces démontées et mesurées récemment sur cette voiture. Il est donc exact, contrairement à la vue d'ensemble approximative datant de 1914 que l'on peut voir à gauche.
Sur cette photo d'époque, on remarque le bloc cylindre borgne d'une pièce avec la culasse et les carters d'arbres à cames rapportés
la Type S en action lors d'un Grand Prix
Autres desmo 4 soupapes de la même époque:
la Packer Special 3 soupapes construite aux USA en 1914 (une photo, une video et plus de détails)
une photo d'une réplique
Miller aux USA en 1915 (plus de détails ci-dessous)
Bignan en France en 1923 (pour plus de détails, cliquer sur le lien "bignan" en haut de cette page)
Le moteur Miller 4 cylindres desmo:
En 1915 aux USA, Harry Miller remplaça le moteur cassé de la Delage type S de Barney Oldfield par un 4 cylindre en alliage léger de sa conception.
Il comportait un simple arbre à cames en tête actionnant 4 soupapes par cylindre au moyen d'un système desmodromique à culbuteurs beaucoup mieux conçu que le système Delage à étrier. C'est l'ancêtre des distributions desmodromiques modernes. Une version plus puissante de ce moteur destinée à l'aviation fut également produite.
En 1917, Miller construisit avec Offenhauser et Oldfield une nouvelle voiture à carrosserie fermée en aluminium équipée de ce moteur desmo 4,8 litres (111 x 180 mm) développant 136 hp à 2950 rpm (une photo de ce moteur). La "Golden submarine", nommée ainsi à caude de sa carrosserie aérodynamique, remporta 20 victoires ainsi que de nombreux podiums en compétition et battit plusieurs records de vitesse sur 10 et 25 Miles.
Néanmoins, Miller ne persista pas dans la distribution desmodromique par la suite. Les 8 cylindres en ligne et les V16 double arbre à cames dessinés par Leo Goossen dans les années 20 comportaient une distribution classique.
En 1933, Harry Miller fit faillite et son entreprise fut rachetée par son ancien chef d'atelier Fred Offenhauser qui produisit alors des moteurs de compétition sous son propre nom. Les moteurs 4 cylindres double arbre à cames Offenhauser (surnommés "Offy" engines par les américains) remportérent de nombreuses victoires en compétition, notamment à Indianapolis, jusqu'aux années 70.
Miller poursuivit néanmoins ses activités avec d'autres associés dans une petite structure et ses voitures continuérent à briller en compétition aux USA jusqu'en 1939.
Harry Miller dans son atelier avec son 8 cylindres en ligne
la Golden submarine et quelques photos de détais du moteur dsmodromique:
Sur la photo du milieu, on remarque les cames rapportées par groupe et les culbuteurs communs pour chaque paire de soupapes ainsi que les ressorts destinés à parfaire la fermeture des soupapes.
(voir cette page du site "The Old Motor" d'où proviennent ces photos avec plus de détails sur ce ce moteur desmo et sur la Goldensubmarine)
Les culasses 4 soupapes de Taglioni:
"Dr T" a réalisé quelques prototypes de culasses 4 soupapes, dont une à distribution desmodromique.
diverses culasses 4 soupapes Ducati anciennes
En 1959, il conçut son premier moteur à 4 soupapes par cylindre.
Le moteur de la 125 de GP était un 4 cylindres en ligne double arbre à cames à distribution classique qui développait 24 hp à 16.000 rpm. Les soupapes étaient actionnées par des linguets et disposées suivant un angle de 90°. Mais Ducati ayant décidé d'arrêter la compétition, ce projet fut mis en sommeil jusqu'à ce qu'en 1965 à la demande de Mototrans, une machine fut construite.
(quelques belles photos de cette moto sur ce site et plus de détails ainsi que d'autres photos sur cette page)
le mécanicien Franco Farnè durant les premiers essais de la moto
Mais c'était trop tard, dépassé d'emblée par la concurrence, cette 4 cylindres n'a jamais couru. Cette année là, Honda fut champion du monde en 125 cc avec une 5 cylindres de 34 hp.
Aux alentours de 1965, Taglioni dessina une culasse 4 soupapes destinée au monocylindre 350:
Elle comportait deux arbres à cames étrangement très rapprochés, qui actionnaient les soupapes au moyen de culbuteurs avec un angle de 90° (Taglioni n'a jamais utilisé des poussoirs de soupapes). Faute d'espace entre les arbres à cames, l'allumage était assuré par deux bougies placées aux extrémités de la chambre de combustion. De plus à cause de l'angle important entre soupapes, le conduit d'admission comportait un coude trés prononcé à l'intérieur de la culasse. Par ailleurs, différentes versions ont été réalisées, avec simple ou double sortie d'échappement (photos ci-dessous).
On peut toutefois se demander ce qui est passé par la tête de Taglioni pour dessiner des horreurs pareilles. Mais il n'est pas impossible qu'il l'ait fait sciemment pour prouver à ses directeurs curieux d'en avoir le coeur net, que les 4 soupapes n'étaient pas une bonne solution. Toujours est-il qu'une culasse de ce type aurait été testée au banc d'essais sur un monocylindre de course, et comme il fallait s'y attendre, les résultats étant très décevants, aucune machine de ce type ne fut engagée en compétition
Un exemplaire d'un moteur de ce type a été conservé, il fait partie de la collection de Rino Caracchi, l'un des créateurs de NCR (photo du bas avec son fils Stefano).
Vers 1968, Taglioni conçut une culasse expérimentale 4 soupapes desmo
Il semble que ce soit sa seule 4 soupapes desmo. Modifiée artisanalement par soudure, elle dérivait d'une deux soupapes. Étant donné la forme en Y des culbuteurs de fermeture (avec l'un des deux différent et cassé sur la photo), on peut penser que l'arbre à cames ne comportait que 4 cames et que c'était le même que celui du 2 soupapes. Cette culasse destinée à la 350 SCD (Super Corsa Desmo) a sûrement été testée au banc d'essais, mais il est peu probable qu'une 350 SCD desmo 4 soupapes ait été engagée en compétition.
Par la suite vers 1971, Taglioni à réalisé des culasses 4 soupapes pour la 500 GP L-twin:
Elles comportaient un arbre à cames non desmo, un angle entre soupapes de 60° et un double allumage.
Cette 500 GP 4 soupapes qui disposait de 65 hp à 12000 rpm, fut engagée épisodiquement en compétition et Parlotti remporta une victoire à son guidon lors d'un doublé avec Giuliano en Slovenie en 1971 en l'absence des MV Agusta (photo de droite en bas). Ce fut l'unique victoire remportée par la 500 GP.
Par ailleurs, il est étonnant que, même sur la version standard à 2 soupapes qui développait 63 hp à 11500 au début et 72 hp à 12000 rpm en fin de développement, Taglioni n'ait pas adopté la distribution desmodromique, alors que les monocylindres Super Corsa Desmo en étaient dotés depuis 1966. En effêt, il aurait été facile de reprendre des pièces du 250 desmo. Mais ce n'est que la version officielle et il probable que Taglioni ait testé la distribution desmodromique sur la 500 GP. D'ailleurs en 73 avec 72 hp, elle faisait presque jeu égal avec la MV 3 cylindres d'Agostini qui développait 80 hp.
les culasses 4 soupapes non desmo testées sur la 500 GP
à droite Parlotti et Giuliano lors du doublé à Skofja
Pour l'anecdote, Mike Hailwood fut invité à essayer la 500 GP ainsi que la 750 Imola alors qu'il courait en Formule 1 chez Surtees (photo de gauche).
la 500 GP 2 soupapes déshabillée
Une autre version 4 soupapes de cette 500 GP a été construite par Renato Armaroli à la demande de la direction en 1972:
C'était un double arbre à cames avec un angle très faible (15°) entre soupapes et les admissions au centre. De plus, les arbres à cames des deux cylindres étaient entraînés par une seule et unique courroie crantée. Il était prévu d'équiper ce moteur du système d'injection Spica qui avait été testé par Taglioni sur la version à deux soupapes. Le moteur 500 GP "prototipo" dévelopa 72 hp à 11500 rpm lors de son unique passage au banc d'essais d'ailleurs éffectué en l'absence d'Armaroli.
Mais lors de la restauration de cette machine des années plus tard, il savéra que faute d'avoir été soigneusement monté, ce moteur présentait un défaut d'étanchéité sur une soupape. Il est donc clair que moyennement un peu de développement, ce 4 soupapes se serait montré nettement supérieur au 2 soupapes de Taglioni.
Cette machine a été engagée à deux reprises en 1973 dans des épreuves nationales aux mains de Spaggiari. Mais elle n'a pas dépassé le stade des séances d'essais à cause de problèmes de tenue de route. En effet, le tube gauche du cadre avait été cintré en "S" pour laisser la place à la courroie de distribution et il est probable que la rigidité du cadre en ait été affectée. Il aurait été facile d'y remédier au moyen de tubes de renfort, mais de toutes façons ce moteur ne plaisait pas à Taglioni, ce n'etait pas lui qui l'avait conçu et il a fait rapidement mettre ce projet "au placard"...
(ci-dessous une photo de cette 500 restaurée par Armaroli lui-même pour un collectionneur)
Dans la même période, diverses culasses 4 soupapes simple arbre à cames ont été testées pour la 750 SS.
Cette Imola Replica a été construite il y a environ 10 ans par un ingénieur de Bologne, elle utilise un bas-moteur de 750 GT avec toutes les pièces d'époque qu'il a pu récupérer dans les réserves du musée de l'usine.
(voir cette page avec de belles photos et des dessins de détail de la culasse)
En 1975, Taglioni a réalisé une nouvelle culasse 4 soupapes alors qu'il travaillait sur les 900 SS à couples coniques:
C'était une belle double arbre à cames constituée de deux parties superposées. Les soupapes, actionnées par des linguets, étaient disposées à 30° (un record pour Taglioni !) et la bougie était au centre. Il n'a fait fabriquer qu'une seule culasse pour la tester sur un moteur de 860 GT dont le cylindre horizonal avait été déposé. Mais ce projet est resté sans suite, car lors de mesures comparatives au banc d'essais, l'avantage des 4 soupapes ne s'avéra pas flagrant.
Cela dit, comme sur les double arbre à cames 4 soupapes précédents dessinés par Taglioni, le conduit d'admission de la culasse comportait encore un coude court et très courbé à environs 80°, malgré l'angle très faible entre soupapes. Il est clair que dans ces conditions, ce 4 soupapes ne pouvait guère être plus performant qu'un 2 soupapes desmo.
Il n'est d'ailleurs pas impossible que cette culasse ait été destinée à un éventuel prototype monocylindre 500 cc. Mais la direction décida d'interrompre la production de ce type de machines en 1975, alors qu'ils étaient redevenus à la mode avec le lancement de la Yamaha 500 XT. Une Ducati 500 Scrambler 4 soupapes aurait peut-être eu ses chances sur le marché à l'époque.
Finalement, aucun des moteurs 4 soupapes conçus par Taglioni n'a été produit en série.
la culasse 4 soupapes double arbre à cames de 1975
En 1972, des culasses spéciales avec un angle ramené à 60° avaient été réalisées par NCR pour des 750 desmo 2 soupapes de compétition, les fameuses 750 Imola. Ces machines se montrèrent particulièrement efficaces, elles développaient 86 hp, mais cela n'empêcha pas de Taglioni de conserver un angle de 76° sur les L-twins à couples coniques de série jusqu' à la fin.
Plus tard, des préparateurs américains ont modifié des culasses de 750 F1 à courroie crantée pour les monter sur des 900 à couple conique. Le simple fait de passer de 76° à 60° entre soupapes, procura un gain de puissance d'environs 10%. Modifiés en 905 cc avec un alésage porté à 88 mm, ces moteurs atteignaient 90 hp à 8500 rpm.
A titre indicatif, une 900 SS (864 cc) de série des années 75 à 80, avec les carburateurs de 40 mm et des silencieux Conti, développait 66 hp en sortie de boite de vitesses à 7400 rpm, soit environs 75 hp au vilebrequin. Ces chiffres ont été relevé au banc d'essais par des préparateurs Américains afin de quantifier précisément le gain apporté par leurs modifications.
Il faut compter entre 15 et 20 % de pertes par frottement entre le vilebrequin et la roue arrière, dont environs une moitié dans la transmission primaire et la boite de vitesses et l'autre moitié au niveau de la chaine et du pneu. Notons que les constructeurs de motos mesurent toujours la puissance de leurs prototypes en sortie de boite de vitesse, autrement dit à la couronne arrière. La puissance au vilebrequin est obtenue par calcul. Le problème c'est que certains constructeurs annoncent la puissance à la couronne arrière et d'autres au vilebrequin, ce qui fausse les comparaisons.
(Les frottements dépendent des matériaux des pièces en contact, de leur surface et de leur nombre. Ils augmentent aussi avec la vitesse de rotation. Par ailleurs une huile trop visqueuse entraîne des pertes de puissance, d'où l'interêt des huiles synyhétiques qui sont moins visqueuses que les huiles minérales tout en étant plus performantes, elle lubrifient mieux et leur viscosité diminue moins vite quand la temérature augmente: voir cette page au sujet des caractéristiques des huiles.)
Quant à Taglioni, il mesurait la puissance avec des échappements libres et des carburateurs réglés plus riche. De plus, il annonçait, quant il le faisait, la valeur calculée au vilebrequin, donc bien plus que la valeur exploitable. Á son époque, un grand "flou artistique" reignait chez Ducati quant à la puissance réelle des moteurs...
Par exemple, la fiche technique de la 250 desmo indiquait 25 hp, alors qu'elle n'en développait même pas 19 et la puissance de la 750 GT de 1971 avec ses carburateurs de 30 mm (57 hp à 7700 rpm), n'a jamais été divulguée par l'usine.
Quant aux 750 F1 Montjuich et Laguna Seca de série, elle développaient soit disant 95 hp d'après leur fiche technique, soit autant que la F1 851 cc de compétition engagée aux 200 Miles de Daytona, ben voyons...En réalité leur puissance d'élevait à 76 hp à 9000 rpm.
Bordi et Taglioni lors des essais au banc d'un moteur 750 F1 de compétition
Par ailleurs, avant son 4 soupapes à courroie crantée 500 GP "prototipo", Renato Armaroli a réalisé dans les années 60 d'autres culasses simple arbers à cames 4 soupapes non-desmo pour des monocylindres et des bicylindres 125 chez Ducati Mototrans en Espagne (photos ci-dessous).
A plusieurs reprises, les moteurs modifiés par Armaroli se sont avérés plus puissants que les 2 soupapes de Taglioni. Pourtant, faute de moyens financiers pour le développement, ils n'ont pas connu le succès en compétition.
culasses simple arbre à cames 4 soupapes destinées au 125 twin de GP,
elles procuraient 6 hp de plus que le desmo "trialbero", soit 30 hp à 16000 rpm
Autres Ducati multisoupapes:
La première Pantah 4 soupapes au Monde:
Le prototype d'essais 600 Pantah double arbre à cames 4 soupapes réalisé en 1983 en australie par Bob Brown pour sa TT2 spéciale, Bob Brown était le propriétaire du Melbourne Desmo Center.
Plus tard, il prit le direction de Ducati Australia, l'importateur de la Marque.
la version monocoque (voir cette page)
la version 680 cc à injection du 4 soupapes de Bob Brown basée sur une 600 Monster
La dernière F1 de Bob Brown cubait 854 cc et développait 102 hp à 9000 rpm, soit 7 hp que la F1 851 d'usine. Le moteur était un 900 SS modifié au niveau des culasses, de plus il comportait un kit cylindres d'alésage 94 mm et un vilebrequin à course courte de 61,5 mm. Quant aux carburateurs, c'étaient des Mikuni FCR de 41 mm.
Différentes versions de cette machine furent construites au cours des années. Elle battit toutes les autres Ducati F1 à chacune de ses sorties (voir cette page avec des belles photos).
Voir aussi le magnifique 4 soupapes desmo Del Biondo des années 90
Le 350 double arbre à cames de Rocco Belli:
C'est sûrement un deux soupapes non desmo, car la culasse n'est modifiée qu'au niveau des arbres à cames. La partie basse d'origine est tronquée et la partie haute qui renferme les arbres à cames est soudée dessus. Mais la réalisation du système combiné couple conique d'un coté et courroie crantée de l'autre est superbe (la source de cette photo)
La Monstro "651 desmotre":
(et la source de cetta page)
Bien plus tard dans les années 2000, une petite série de Monstro 651 "desmotre" 3 soupapes (82,5 x 61.5) a été produite en 28 exemplaires (les premières 900 produites portaient l'appellation 900 "Monstro").
Il paraît que la puissance de ce moteur desmotre s'établissait à 83 hp. Ces machines furent distribués dans diverses concessions pour être testés par la clientèle. La partie haute des culasses à double allumage était quasiment identique à celle de la 992 ST3 avec des soupapes plus petites.
Mais aucune suite ne fut donnée à cette présérie, car l'excellent moteur "desmotre" créé à l'origine par Mengoli, ne plaisait pas au président Minoli qui ne croyait pas trop au succès commercial des Sport Tourisme, les ST2, ST3 et ST 4. Il était d'ailleurs prévu de lancer une 992 SS desmotre, mais pour la même raison, elle ne vit jamais le jour.
Quelques unes de ces Monstro 651 sont encore en circulation. Par ailleurs, des culasses 3 soupapes ont été mises en vente par un concessionnaire et certains propriètaires de 600 les ont montées sur leurs moteurs (photos ci-dessous).
juste pour le coup d'œil, une belle ST3 café racer
Mais Taglioni ne démordait toujours pas des soupapes inclinées à 80 ou 90° avec des pistons fortement bombés. Il faudra attendre 1971, pour qu'il se décide provisoirement à passer à 60° pour le moteur de la 500 GP. Cela ne l'empêcha pas de conserver un angle entre soupapes de 76° sur le L-twins à couples coniques de série. Toutefois, la 750 qui remporta un doublé à Imola en 1972 et disposait de 82 hp à 9000 rpm comportait des culasses avec un angle entre soupapes 60°. Ce n'est qu'en 1976, qu'il accapta enfin d'écouter de jeunes ingénieurs et de de passer à 60° pour un modèle de série lors de l'étude du projet "500 L-twin", la future Pantah.
Précisons que l'appellation "TT F1" est un peu érronée: les dénominations officielles des Ducati de compétition de cette époque sont les suivantes: les 600 TT2 engagées en TT F2 de 82 à 85 et dérivées des 600 Pantah, les 750 TT1 engagées en TT F1 en 83 et 84 quasi identiques aux TT2 , mais avec un vilebrequin de 650 Pantah comportant une course de 61,5 mm et des cylindres spéciaux procurant un alésage de 88 mm, et enfin les 750 F1 de 85 à 87 dérivées de la 750 F1 Montjuich de série (photos ci-dessous).
Les deux types de 750 ont été engagées tour à tour dans le championnat TT F1, mais on nomme communément "TT F1" les dernières versions compétition de la F1 construites de 85 à 87, pour mieux les distinguer des TT1 et des 750 F1 de série. Enfin, des prototypes F1 poussés à 818 cc (92 x 61,5 mm) et 851 (92 x 64 mm) ont été construits en 1986 pour le championnat "Battle of the Twins" (une photo).
la F1 851 victorieuse à Daytona
La F1 851 cc qui développait 95 hp remporta la victoire dans la course de la série "Battle of The Twins" à Daytona en 1986 avec Marco Luchinelli au guidon, mettant ainsi fin à la domination des Harley-Davidson XR 1000 préparées par Lucifer Hammer qui atteignirent 104 hp à 7500 rpm au début des années 90 (une photo). Certaines furent même poussées à 1300 cc par des préparateurs.
Par ailleurs, la Vincent Irving dérivée de la 1000 atteignit même 1570 cc en fin de développement, elle développait 165 hp à 6500 rmp avec des culasses à 4 soupapes, elle remporta une victoire à Daytona (une photo). Aux USA, il n'existait aucune limite de cylindrée dans ce championnat.
La génèse du "desmoquattro" ou le chef-d'oeuvre de Massimo Bordi:
Massimo Bordi entre Taglioni et Domenicali en 1985
Taglioni est visiblement déja marqué par la maldie
(et Claudio Domenicali a été nommé PDG de Ducati en 2013)
Massimo Bordi présenta sa thèse de doctorat en génie mécanique à l'université de Bologna en 1974. En 1973 et 1974, il la prépara chez Ducati en collaboration avec Gianni Vetrini, un camarade de promotion, qui fut ensuite ingénieur dans cette Maison jusqu'en 1992.
Leur sujet, supervisé par le Professeur Bartolozzi, avait pour objet un projet de culasse destinée aux L-twins à couples coniques, dont la principale originalité résidait dans une commande desmodromique associée avec 4 soupapes par cylindre. Ce projet comportait également un double arbre à cames combiné à un angle entre soupapes réduit à 40°.
En effet, l'idée de base consistait à combiner les avantages de la technologie des moteurs de Formule 1 de l'époque, en particulier les Cosworth, avec la distribution desmodromique.
Taglioni fournit à Bordi et Vetrini l'aide dont ils avaient besoin pour leur thèse, mais malgré l'intérêt évident du projet, il ne fut pas convaincu. "Il Dottore", fidèle à la vieille école et pour le moins têtu et conservateur, ne voulait pas démordre de ses 2 soupapes. Il assurait qu’aucune des culasses 4 soupapes qu’il avait réalisées n’avait apporté de gain important. C'est tout simplement parce qu'elles étaient mal conçues avec, entre autres défauts, un angle trop important entre soupapes (photo ci-dessus: la culasse prototype de Taglioni pour 900 SS).
Pourtant, aussi bien en Grand Prix moto qu'en Formule 1, les 4 soupapes s'étaient imposés depuis la fin des années 60, en grande partie grâce à une évolution fondamentale, une forte réduction de l'ange entre soupapes. Les ingénieurs anglais Harry Weslake et Keith Duckworth avaient démontré que dans une configuration à 2 soupapes, le rendement était meilleur avec un angle d'environs 60° et que dans le cas d'un 4 soupapes, il ne fallait pas dépasser 40°.
Mais ces "détails" avait sûrement échappé au Maître, peu enclin à s'intéresser aux innovations. Il allait même jusqu'à affirmer que l'angle de 80° qu'il avait adopté (empiriquement) sur les mono-cylindres Mark 3 était le meilleur possible pour favoriser l'écoulement des gaz dans la chambre de combustion. Sur les L-twins de série cet angle fut légèrement réduit avec 76°.
Finalement, bien que la culasse de Bordi et Vetrini ait été réalisée, il est peu probable qu'elle ait été testée au banc d'essais. A l'époque, les 750 Imola développaient 82 hp à 9000 rpm. Il est clair qu'une version 4 soupapes ainsi conçue aurait pu développer plus de 90 hp, mais Taglioni n'a pas voulu pas le savoir...
remarquer le dessin très astucieux avec la came de fermeture centrale (en jaune) commune à deux soupapes
(ces documents sont empruntés au site "Desmodromology")
Des idées neuves:
Alors que Bordi préparait sa thèse, Taglioni lui montra la culasse 4 soupapes simple arbre à cames qu'il avait testée sur la 500 GP. Mais Bordi a immédiatement pensé que le dessin n'était pas bon, parce que l'angle entre soupapes de 60° était beaucoup trop grand pour un 4 soupapes.
Il faut savoir que jusqu'aux années 70, avec la mode des culasses hémisphériques, les motoristes adoptaient couramment des angles supérieurs à 70°. Par exemple, sur les 3 cylindres MV Agusta 350 et 500 multiples championnes du monde de 1966 à 1972, pourtant équipées de culasses à 4 soupapes, l'angle atteignait 73,5°.
Depuis la Pantah lancée en 1980, les Ducati 2 soupapes comportent un angle de 60°. Sur la nouvelle génération des "gros blocs" 1000 et 1100 cc "desmodue" lancés en 2003, il a été ramené à 56°. Quant à l'excellent moteur "desmotre" à 3 soupapes de la ST3, il adoptait la même configuration que les "desmoquattro" avec 40°.
Un angle entre soupapes réduit (aux alentours de 30°) permet d'obtenir une chambre de combustion plus compacte. Cela procure un meilleur rendement thermique, parce que la combustion est plus rapide et que les pertes calorifiques par le ciel de culasse et le piston beaucoup moins bombé sont diminuées. Le rendement thermique est d'autant meilleur que le rapport surface/volume de la chambre de combustion est faible. De plus, le taux de compression peut être augmenté, car les risques de cliquetis sont diminués et l'allumage est plus efficace avec la bougie placée au centre.
Par ailleurs, un ciel de culasse plus plat offre moins de surface disponible pour les soupapes, mais avec 4 soupapes elle est mieux utilisée, ainsi la section totale de passage des gaz est augmentée. C'est pour cette raison que sur les 2 soupapes modernes on reste aux alentours de 60° (57° sur les Ducati 2 soupapes récents), avec 40° la surface serait trop faible pour loger des soupapes de diamètre suffisant. Enfin, une diminution de l'angle entre les soupapes permet de réduire la courbure des conduits d'admission. Avec une section de passage des gaz augmentée, cela permet d'améliorer nettement le remplissage des cylindres.
Au total, le gain de puissance peut être considérable, entre 20 et 25 % à régime égal, sans inconvéniant quant au couple moteur à moyen régime. Mais le refroidissement doit être amélioré en conséquence. Depuis les années 80, la plupart des motos à hautes performances sont refroidies par eau.
Reprenant les travaux d'Harry Weslake, l'un des concepteurs de la culasse du Norton Manx, le constructeur de moteurs de voitures de compétition Cosworth a été un précurseur en la matière dans les années 60 (comme BMW), en prouvant la validité de cette solution avec des angles inférieurs à 40° sur des moteurs 4 soupapes de Formule 2. Conçu en 1966, le V8 Coswoth DFV 3 litres remporta plusieurs GP en 67 et fut chamion du monde de Formule 1 dès sa seconde saison de compétition en 68 avec l'écurie Lotus. Passant de 405 à 510 hp au cours de son évolution de 1967 à 1983, il était presque aussi puissant que les divers V12 de la concurrence. Ce V8 Cosworth domina la Formule 1 au sein de nombreuses écuries durant une quinzaine d'années avec un total impressionnant de 155 victoires en GP.
C'est en cela que Bordi se distinguait des autres motoristes Italiens qui travaillaient trop empiriquement. Il s'était intéressé de près aux travaux de recherche des anglais plus pragmatiques, qui avaient compris depuis longtemps que les performances d'un moteur ne dépendent pas uniquement de son architecture, mais aussi de l'efficacité thermodynamique au niveau de la culasse et du piston.
Les ingénieurs Britanniques savaient depuis 1950 que des chambres de combustion compactes avec un angle étroit entre soupapes permettent une combustion plus rapide, car les pertes de chaleur sont moindres. Le prototype 500 Norton 4 cylindres comportait des soupapes à 60 degrés, alors que les 4 cylindres italiens, dont les dessins étaient inspirés des moteurs de course automobile des années 30, comportaient des angles de soupapes de 80 à 100°. Les derniers 500 Norton Manx (86.1 x 85.6 mm) produits au début des années 60, dont l'angle entre soupapes s'établissait à 64°, comportaient des pistons quasiment plats et dépassaient 100 hp/litre avec 54 hp à seulement 7200 rpm, tout en disposant d'un excellent couple moteur à moyen régime. Voir cette interview très intéressante de Joe Craigh, le créateur de ce moteur.
D'ailleurs, la cause du déclin de l'industrie motocycliste anglaise après ces années là, n'est pas une baisse de compétence des ingénieurs. Il est la conséquence d'un début de crise économique. et aussi du rachat des grandes entreprises par du purs financiers ignorant tout de la moto(ce fut d'ailleurs le cas de nombreuses autres industries anglaises dont l'automobile). Pour preuve, les moteurs de Formule 1 anglais (Climax, Cosworth, BRM, Weslake) ont été régulièrement les meilleurs de 1960 à 1982.
Á la même époque au milieu des années 60, Honda l'avait compris en adoptant des angles d'environs 55° sur ses moteurs à 4 soupapes.
En 1978, durant la mise au point du prototype 500 L-twin (la future Pantah), Bordi fut recruté chez Ducati à la suite d'un stage. Mais Taglioni ne voyait pas d'un bon oeil qu’un jeune ingénieur avec des idées nouvelles vienne marcher sur ses plates bandes. D’un caractère pas toujours facile, il préférait travailler avec ses fidèles et inséparables Gianluigi Mengoli (chef du bureau d'études), Pierro Cavazzi (ingénieur) et Franco Farnè (chef mécanicien du service compétition). Sous des airs affable, il était autoritaire et ses propositions étaient souvent des ordres, ce tempérament lui valut d'ailleurs plusieurs conflits avec la direction.
C'est ainsi que Bordi fut rapidement expédié au DDD (Ducati Diesel Dipartimento) où, beau joueur, il affirme avoir beaucoup appris sur la thermodynamique et la fiabilité. Du coup, les relations entre Bordi et Taglioni se sont nettement refroidies.
C'était le sort que le maître réservait généralement aux jeunes docteurs en génie mécanique talentueux qui risquaient de lui faire de l'ombre.
Ainsi à la même époque, Giuseppe Bocchi, (un brillant ingénieur également titulaire d'un doctorat, qui avait fait ses preuves dans les départements compétition de Ferrari et MV Agusta) fut chargé par la direction de travailler sur une version 4 soupapes du moteur Pantah. Cela déplut fortement à Taglioni qui manoeuvra pour qu'à son tour il soit écarté, en proposant de le "promouvoir" au poste de chef du département Diesel. Bocchi quitta alors Ducati et créa BRD, sa propre société d"engineering. C'est à cette époque qu'il conçut le 12 cylindres à plat de la Tecno de F1.
Taglioni, à l'approche de la soixantaine, gros fumeur épuisé et en mauvaise santé depuis 1978, se sentait de plus en plus menacé dans son autorité. Mais en 1980, l'état de santé du "Dottore" s'aggrava encore et la direction demanda au brillant Bordi de se joindre à son équipe. Il a alors participé au développement des Pantah, 750 TT1 et F1. Il a également été spécialement chargé en 82 de la conception des ultimes versions des modèles à couples coniques 900 MHR et S2 avec embrayage à sec et enfin, des "Mille" MHR et S2 à vilebrequin monobloc qui furent commercialisées jusqu'en 1986.
Bordi de retour aux cotés de Taglioni vers 1984 durant la mise au point de la version endurance du moteur 750 F1.
Le regard de Bordi en dit long sur l'affection qu'il portait à Taglioni
(une version moderne du carter d'alternateur de ce moteur)
Mais en 1985, Ducati était si mal en point, que l'état italien décida de s'en séparer. Heureusement, Cagiva se porta acquéreur et la marque fut sauvée in extremis avant d'être consolidée financièrement. Ducati restera aux mains de Cagiva durant 11 années.
Taglioni, de plus en plus souffrant, étant alors contraint de travailler à mi-temps, Bordi fut nommé ingénieur en chef.
A partir de là, le rôle de Taglioni au sein de l'usine devint de plus en plus symbolique. Ainsi, bien que conçues en principe sous sa direction, les 750 et 906 Paso, dessinées par Tamburini, ainsi que les dernières évolutions 851 cc des F1 de compétition ont été l'oeuvre de Bordi et Mengoli, sans parler des desmo 4 soupapes dont il est question plus bas. Finalement,Taglioni partit à la retraite fin Mai 1989 et Bordi le remplaça dans la fonction de directeur technique.
Le nouveau projet desmo 4 soupapes de Bordi:
En 1985, aussitôt nommé ingénieur en chef, Bordi reprit le principe de sa thèse de 1974, et se lança avec Mengoli dans l'étude d'une évolution du moteur 750 F1 qui combinait la distribution desmodromique avec la technologie des Formules 1. Le projet, remis au goût du jour depuis sa thèse, comportait toujours un double arbre à cames en tête et 4 soupapes à 40°, avec en prime, un refroidissement liquide et aussi une alimentation par injection électronique multipoint. Toutefois,ce n'était pas une première sur une moto de course (la JJ Cobas BMW K100 à injection Bosch remporta 6 victoires en Espagne en 1985: voir cette page du site consacré à Antonio Cobas).
D'ailleurs, dans le monde de la moto, Bordi n'était pas seul à travailler dans cette direction. La V4 Honda RVF 750 R d'endurance présentée en 1983 aux 8 heures de Suzuka, restait fidèles aux carburateurs, mais comportait déjà 4 soupapes avec un angle de 40°, ainsi qu'un refroidissement liquide.
Une parenthèse au sujet de l'injection d'essence sur les automobiles et les motos:
(pour sauter cette parenthèse, cliquer ici)
Les premiers essais d'injection d'essence ont été réalisés par le Français Leon Levasseur en 1902 avec un système à injection indirecte rudimentaire qui est resté sans suite.
Mais l'injection a été réellement mise au point sur des moteurs d'avions dans les années 30 et largement utilisée par les Anglais, les Américains, les Allemands et les Japonais durant la seconde guerre mondiale. En 1948 aux USA, Stuart Hilborn et Jim Travers mirent au point un système à injection indirecte continue dérivé de matériel d'aviation qui fut rapidement adopté par Offenhauser pour les moteurs des voitures des courses type Indianapolis.
Mercedes fut le premier à l'utiliser sur une Formule 1 avec un système d'injection mécanique directe Bosch sur les W 196 et 300 SLR championnes du monde en 1954 et 1955. En 1960, la Mercedes 220 SE, un modèle de série, fut équipée d'un système Bosch indirect.
Dès 1955, le système Anglais d'injection indirecte Lucas fut testé avec succès la Jaguar D. Elle remporta la victoire aux 24 Heures du Mans. Ferrari utilisa avec succès un système d'injection directe Bosch modifié sur ses moteurs de Formule 1 de 1962 à 1964. L'injection mécanique s'est généralisée ensuite sur les Formules 1 à partir de 1965, avec des équipements indirects Lucas (Keihin chez Honda).
Mais il faudra attendre quelques années pour voir arriver l'injection sur de rares moteurs de motos de course comme le 500 URS créé par Helmut Fath, champion du monde de side-car à la fin des années 60 avec son moteur. Il était équipé d'une injection mécanique indirecte Bosch et développait la remarquable puissance de 86 hp à 13.500 rpm, soit plus que le 500 MV Agusta. Monté sur une moto, ce moteur permit à Karl Hoppe de faire plusieurs podiums en Grand Prix.
Le 4 cylindres Fath URS à injection
(en haut à droite sur une moto de Grand Prix avec un cadre Seeley, en bas à gauche sur le side-car et à droite avec la double admission sur la version 750)
Ducati et MV Agusta firent également des essais d'injection sur leurs 500 de Grand Prix dans les années 70 avec un système italien Spica. Godier et Genoud montèrent également une injection mécanique Lucas sur leur 1000 Kawasaki d'endurance en 1976. Mais bien qu'elle remporta la victoire, elle ne courut qu'une seule fois dans cette configuration.
Finalement, très peu de motos de compétition ont été équipées de systèmes d'injection mécanique. Cela s'explique peut-être par le fait que l'entrainement de la pompe à haute pression du système Bosch consommait de la puissance. La meilleure pulvérisation de l'essence apportait un plus de rendement d'environs 10 %, mais le bilan global n'était positif qu'à partir d'une puissance assez élevée (environs 100 hp) et pratiquement aucun moteur de moto n'atteignait ce chiffre avant les années 80. D'ailleurs par la suite, Helmut Fath monta des carburateurs Keihin sur son 4 cylindre 500 URS et également sur la version 750 cc, car la différence de puissance était négligeable. De plus, les systèmes d'injection étaient beaucoup plus coûteux que les carburateurs.
Contrairement au système Bosch qui comportait une pompe nourrice et une pompe haute pression à pistons, le dispositif Lucas des Formules 1 de l'époque était constitué d'une petite pompe assurant une pression constante de 7 bars qui alimentait un distributeur régulateur de débit (photo ci-dessous). Seul Honda utilisait un système Keihin japonais très semblable sur ses moteurs de Formule 1.
Les injections électroniques modernes des machines du commerce comportent des injecteurs perfectionnés qui fonctionnent à des pressions plus faibles de l'ordre de 3 bars et de petits moteurs électriques suffisent à entraîner les pompes nourrices. Comme les Formules 1, les machines de MotoGP comportent un alternateur à cause de l'électronique embarquée mais aussi parce que la pression d'injection est élévée afin d'obtenir une meilleure pulvérisation. De plus, à haut régime, les durées d'injection sont très réduites (quelques millisecondes), sur le V8 Renault 2,4 litres de F1 qui tournait à 19.000 rpm la pression était réglée à 100 bars.
En fait, le tout premier système d'injection électronique, multipoint, séquentielle et phasée, a été conçu par Bendix aux USA en 1957 sous le nom d'EFI (Electronic Fuel Injection). Il était proposé en option sur des modèles Chrysler , Dodge et DeSoto, mais le boitier électronique était sujet à des pannes fréquentes à cause de la fragilité des composants. AMC testa également ce système sur des Rambler. Une Chrysler d'époque équipée de ce système fonctionne parfaitement de nos jours, grâce à des condensateurs modernes.
L'injection purement électronique commença à se répandre sur les voitures de grande série à partir de 1967. Citroën équipa la DS 23 d'un système Electrojector multipoint fabriqué par Bosch et déja basé sur le principe p/n (dépression à l'admission/régime moteur). Deux ans auraravant, Bosch avait développé un système mixte, le K-Jectronic: pompe mécanique et régulation électronique, (qui fut adopté par VW, Mercedes-Benz, Porsche, Ferrari, Saab et Volvo) avant de racheter le brevet de l'EFI de Bendix pour mettre au point l'Electrojector purement électronique, appelé plus tard D-Jectronic. Ce système remporta rapidement un grand succès et fut ensuite imité par divers concurrents.
Pourtant, l'injection électronique n'a été utilisée que beaucoup plus tard en Formule 1. En 1984, Renault fut le premier à l'essayer avec succès sur son V6 1500 turbo. Les autres constructeurs y vinrent alors rapidement.
Kawasaki fut le premier constructeur de moto à l'adopter avec la Z1000 Mk 2 "EFI" en 1980 et ensuite sur la 1300 Z 6 cylindres en 1984 (voir ce dossier technique très complet au sujet de l'injection motos).
L'apparition tardive de l'injection électronique sur les motos de course tient au fait qu'à l'époque les moteurs 2 temps dominaient les Grands Prix dans toutes les catégories et qu'à l'époque, l'injection était très délicate à mette au point sur ce type de moteur (par contre en 2002, les 4 temps 1000 cc de MotoGP l'ont immédiatement adoptée).
Motobécane l'essaya avec un système semi-direct et des capteurs optiques sur sa 350 3 cylindres 2 temps. La mise au point s'avéra difficile et se déroula de 1973 à 1978. Le moteur à injection consommait peu, mais quels que soient les réglages essayés, il fonctionnait irrégulièrement à certains régimes.
Par ailleurs, un faux prototype 500 à injection fut présenté au salon de la moto de 1973 dans un but de marketing (une photo ce prototype). Un vrai moteur 500 fut construit par la suite mais aucune moto de cette cylindrée fut produite en série. Finalement, Motobécane conserva les carburateurs pour le modèle de série (un dossier très détaillé sur ce système d'injection).
Bimota en à aussi fait les frais avec sa 500 V-Due 2 temps à injection semi-directe lancée en 1996 qui fut un échec magistral et causa la mise en liquidation de l'entreprise. L'étude avait coûté très cher et de plus, Bimota dut modifier à ses frais toutes les machines vendues en montant des carburateurs. Certaines de ces machines ont alors participé à des courses dans le cadre d'une coupe 500 Bimota.
Ce n'est que beaucoup plus tard que des spécialistes ont réussi à faire fonctionner correctement ce système d'injection grâce à un nouveau logiciel. Ainsi, quelques V-Due roulent à présent sur la route sans problèmes (voir cette page).
De nos jours, les 2 temps à injection directe sont parfaitement au point. On en trouve sur des scooters, des motos tout-terrain, des motoneiges et des moteurs hors-bord. Ils sont performants et économes tout en safisfaisant aux normes de pollution.
Par ailleurs, des prototypes de moteurs diesel 2 temps suralimentés par turbo et compresseur combinés sont à l'étude chez plusieurs grands constructeurs d'automobiles dont Renault (voir cette page intéressante à ce sujet).
Dès 1952, la marque de voitures allemande Goliath lança sur le marché la GP 700 propulsé par un petit bicylindre 700 cc 2 temps doté d'un système d'injection directe Bosch, ce bicylindre développait 29 hp. Goliath produisit également une version Sport et un modèle 900 cc de 50 hp fut lancé 3 ans plus tard.
La Marque revendiquait fièrement une augmentation de puissance de 25 % par rapport un modèle à carburateur. Mais ce fut un échec, le prix de ces modèles était prohibitif et la fiabilité aléatoire (voir cette page illustrée sur ces voitures).
Par ailleurs, le carburateur du Vélosolex a ceci de particulier qu'il ne comporte pas de cuve. D'autre part, son principe est légèrement différent de celui des carburateurs à membrane qui comportent un pointeau. En réalité ce n'est pas vraiment un carburateur, c'est plutôt une sorte de système d'injection mécanique intermittente.
En effet, un volume d'essence est pulvérisé à chaque tour et il varie en fonction de la pression du mélange carburé dans le carter-pompe. C'est donc bien un système PN (Pression / Nombre de trs/mn) puisque le volume d'essence pulvérisé en un temps donné dépend de ces deux paramètres.
Sur un carburateur de moto, le débit d'essence varie de façon continue en fonction de la dépression au niveau du puits d'aiguille et de la position en hauteur de l'aiguille solidaire du boisseau. Un carburateur fonctionne donc en mode αP (P étant la dépression et α étant l'angle d'ouverture de la poignée de gaz).
Extrait d'un dossier technique:
"Les deux types de gestion d’injection électronique que l’on rencontre en moto sont :
• le type αN : l’angle d’ouverture du papillon α et le régime moteur N commandent le calculateur.
• le type PN : la pression dans la tubulure d'admission P et e régime moteur N sont les principaux paramètres qui permettent
de commander le calculateur, l’angle d’ouverture du papillon α ne représentant qu’un paramètre de correction"
L'ancêtre des "desmoquattro", la 748 "IE", une machine bien née:
une page pdf en italien intéressante et très bien illustrée à ce sujet (avec la traduction en français) et une autre (traduite avec Google) avec de belles photos: partie 1 partie 2 et partie 3 et la source de ces pages sur le site Motociclismo
Taglioni cherchait à tout prix à imposer son prototype double-Pantah 1000 V4. Farouchement opposé au projet de Bordi par pure jalousie, il alla jusqu’à adresser en vain un rapport à la direction pour tenter de l’empêcher et même de faire licencier Bordi et Mengoli. Mais en Mars 1985, la Direction donna le feu vert à Bordi, désormais plus écouté que Taglioni. Le "Doppio Pantah" fut définitivement abandonné, et en Septembre 1986, le prototype "desmo 4 V DOHC" était prêt à courir.
Pour info, en anglais 4V (4 valves) signifie 4 soupapes et DOHC (double over-head camshaft) signifie double arbre à cames en tête.
L'histoire de son étude et de sa construction est relatée en page 2.
Par ailleurs, ce fut le premier moteur desmo 4 soupapes au monde réellement efficace, après l'anecdotique Miller américaine de course de 1915.
Une interview intéressante de Massimo Bordi sur cette époque (en italien, mais traduisible par clic droit avec Google Chrome)
divers dessins et pièces de ce moteur
la 748 "IE" desmo 4V du Bol d'or, remarquer l'absence de boite à air sur ces premiers desmo 4 à injection
(Ce qui prouve accesoirement qu'un moteur à injection électronique peut très bien fonctionner sans, il suffit pour cela que le système soit réglé en conséquence. Toutefois, avec une boite à air suffisamment volumineuse, l'injection fonctionne mieux et on obtient plus de puissance.)
Une 750 F1 4 soupapes desmo à injection électronique et refroidissement par eau:
Ce premier prototype, dénommé 748 "IE" (Inezione Elettronica), était une sorte de 750 F1 dotée de cylindres, de pistons et de culasses spéciaux. Il conservait le vilebrequin forgé monobloc et le bas-moteur complet de la F1, avec le même alésage et la même course, soit 88 x 61,5 mm. Un carter latéral gauche spécial avait été réalisé pour recevoir la pompe à eau située au dessus de l'alternateur. Les pipes d'admission, parfaitement rectilignes, étaient logiquement situées au milieu de V comme sur la 750 Paso, et le système d'injection électronique Weber-Marelli IAW, du même type que celui de la Ferrari F40, avait été modifié spécialement pour ce moteur avec un capteur d'angle d'ouverture des gaz à la place du débitmètre. Dans cette configuration 4 soupapes, le 750 desmo développait 93 hp à 9500 rpm, soit environs 10 hp de plus qu'un 750 F1 de compétition".
La boite de vitesse avait été modifiée pour recevoir un sixième rapport, mais craignant que ce montage soit fragile, Bordi décida de conserver le système à 5 rapports pour la course.
Quant au cadre, c'était un F1 de course type usine à suspension arrière progressive profondément modifié à cause de l'encombrement en hauteur des nouvelles culasses. En conséquence, il avait fallu concevoir un nouvel ensemble carénage, réservoir et selle. Dans cette version endurance, la machine pesait environs 160 Kg et atteignait 250 Km/h.
Le Bol d'Or 1986:
La 748 "IE" n'apparut qu'une seule fois en public. Ce fut à l'occasion du Bol d’Or, un épreuve de 24 heures qui se déroulait en France sur le circuit Paul Ricard au Castellet, les 20 et 21 Septembre 1986. Les prototypes étaient admis dans cette course car, exceptionnellement cette année là, elle ne comptait pas pour le championnat du Monde d'endurance pour des raisons de calendrier. Taglioni, Mengoli et Farné avait fait le déplacement avec les trois pilotes de GP, Virginio Ferrari, *Joan Garriga et Marco Lucchinelli. En 7-ème position au matin après 15 heures de course, la 748 fut contrainte à l'abandon à la suite d'une rupture de bielle. Sur une telle durée et avec cette puissance, le bas-moteur de 750 F1 avait atteint ses limites.
Bien sûr, c'était prendre un risque que d'engager cette machine dans une course de 24 heures, mais il fallait tester la fiabilité du nouveau moteur avant la saison de compétition suivante. Cela dit, la machine était prometteuse, elle avait tout de même réussi à occuper durablement la 7ème place sur un circuit rapide, parmi des 4 cylindres japonaises dont la puissance tournait autour de 120 hp.
(* Pour information le pilote espagnol Joan Garriga fut vice-champion du Monde des 250 cc en 1988 sur une Yamaha de l'écurie Ducados, il était très rapide. Par la suite, il courrut occasionnellement en endurance au sein de l'équipe officielle Ducati et aussi sur la 500 Cagiva 4 cylindres 2 temps de GP comme pilote d'usine avec Marco Luchinelli.)
La mystérieuse "4 soupapes" des 8 heures de Jerez :
La semaine suivante, Ducati engagea une 750 F1 aux 8 heures de Jerez en Espagne. C'était la dernière épreuve du championnat du Monde d'endurance, dans lequel seules les machines issues de modèles de série et d'une cylindrée maximum de 750 cc étaient admises.
Sur ce circuit tout récent et particulièrement sinueux, la vitesse moyenne au tour ne dépassait pas 140 Km/h. Lucchinelli et Garriga, les deux excellents pilotes d'usine Cagiva en GP 500, mirent à profit le couple moteur et la maniabilité de leur bicylindre. Garriga fit la pole position et mena la première heure de course. La F1 battit la Suzuki officielle pour finir en deuxième place derrière la redoutable V4 Honda RVF 750 R championne du Monde. La Ducati avait fait forte impression.
(quelques photos de cette épreuve en milieu d'une page du blog j.j.medina)
Garriga en tête à Jerez
le même dans le box avec les motos
Des spectateurs se souviennent que le rugissement de cette Ducati était impressionnant et, après cette performance étonnante, le bruit a couru que c'était une version 4 soupapes. Il est peu probable que Ducati ait annoncé officiellement l'engagement d'une 750 à 4 soupapes, elle n'aurait pas été conforme au réglement. Mais des historiens de la marque réputés le confirment: "...le 28 Septembre 1986 à Jerez, Lucchinelli et Garriga.....sur une 750 TT F1 4 soupapes...." .
les pilotes Ducati à gauche sur le podium
Par contre, certains affirment que c'est la moto du Bol d'or qui était à Jerez, mais c'est inexact. En effet, au vu des photos de l'époque, le cadre était standard ainsi que l'habillage, et à cause de l'encombrement en hauteur des culasses, le nouveau double arbre à cames ne rentrait pas dans ce cadre. De plus, l'échappement était à gauche, contrairement à la 748 "IE". La moto était donc bien une F1, et de toutes façons le prototype 748 "IE", trop éloigné de la série, n'aurait pas été admis.
Mais de quelles culasses ce moteur était-il été équipé ? Durant la période d'étude du moteur Pantah avant 1980, l'ingénieur Bocchi a travaillé sur une version 4 soupapes, et il est probable que son étude a été reprise plus tard afin de tester une culasse 4 soupapes refroidie par air sur une 750 F1, en parallèle avec les ultimes versions 2 soupapes poussées à 818 et 851 cc.
Par ailleurs, ce fut la seule participation de Ducati à ce championnat cette année là. Alors si l'usine a jugé utile de faire le déplacement, c'est probablement pour tester discrètement cette option en compétition avant de valider définitivement le projet "dohc 4V" refroidi par eau de Bordi. Mais, lors de la course de Jerez, aucune photo rapprochée de ce moteur n'a été prise. Alors à ce jour, à part bien sûr à l'usine, on ne sait toujours pas à quoi ressemblait ce 750, qui au vu de ses performances développait environs 90 hp. Il s'agissait certainement d'un simple arbre à cames 4 soupapes desmo, très semblable extérieurement au 2 soupapes. D'ailleurs, ce moteur existait certainement depuis l'année précédente. Dès 84, la direction avait annoncé l'éventualité d'un moteur 750 Pantah 4 soupapes.
culasses Ducati 4 soupapes desmo plus anciennes
A la recherche d'un championnat:
Le prototype 748 "IE" du bol d'Or n'avait pas été conçu pour les courses d'endurance, un bicylindre aussi poussé avait peu de chances de tenir 24 heures. De plus les épreuves "hors championnat du Monde" ouvertes aux prototypes était rares. Depuis 1981, les prototypes n'étaient plus admis en endurance. Restait donc à trouver un championnat prestigieux comportant des épreuves de vitesse.
Le règlement de la formule TT F1, dont la cylindrée maximum avait été fixée à 750 cc depuis 1984, était aussi restrictif que celui du championnat d'endurance également limité à 750, la "4 soupapes" n'y aurait pas été admise non plus, car trop différente de la 750 F1 de série. La Formule 750 de la FIM ayant été supprimée en 1980 et il n'existait pas d'autre championnat du monde de vitesse pure pour les plus 500 cc.
Les seules épreuves de vitesse internationales acceptant les prototypes de plus de 500 cc étaient les séries BOTT "Battle of the Twins". Créées par les Américains en 1981, elles comportaient une catégorie nommée "Pro-Twins" réservée aux prototypes bicylindres jusqu'à 1200 cc, une aubaine pour Ducati.
Des séries identiques étaient organisés en Europe et au Canada, mais la plus renommée avait lieu aux USA, où Ducati avait de bonnes raisons de se faire de la publicité, car ce pays représentait un énorme part de son marché. D'ailleurs en 1986, Marco Lucchinelli avait remporté deux victoires dans ce championnat, à Daytona et à Laguna Seca, au guidon d'un prototype F1 poussé à 851 cc.
Par ailleurs, le championnat AMA Superbike créé en 1976 et très populaire aux USA, était réservé aux machines issues de modèles de série et faisait la part belle aux 4 cylindres japonais. Mais depuis 1986, Ducati y participe régilièrement et a remporté deux titres consécutifs en 93 et 94.
Les débuts d'une épopée:
En vue de ces épreuves, un important travail fut effectué sur la machine du Bol d'Or durant l'hiver. Un deuxième exemplaire fut construit et l'habillage redessiné. Mais la plus grosse modification concerna la cylindrée qui fut poussée à 851 cc par augmentation de la course et de l'alésage à 92 x 64 mm. Comme sur les F1 prototypes 851, les embases de cylindres comportaient des goujons plus espacés. A cette occasion, le diamètre des manetons de vilebrequin fut augmenté de 40 à 42 mm, les bielles furent remplacées par des Pankl en titane, les pistons Mondial par des Omega et la lubrification fut améliorée. Le moteur passa 150 heures au banc d'essais pour des réglages et des tests d'endurance. La puissance grimpa alors à 110 hp à 10.500 rpm, soit 15 de plus que les versions 851 cc des F1. La direction déclara que, pour la première fois, la barre des 100 hp était dépassée sur un moteur Ducati !
Quant à Taglioni, il n'avait pas encore abandonné la partie avec ses F1 refroidies par air. Cela dit, contrairement aux 600 TT2, ces 750 ne brillèrent jamais en formule TT. Même chose en endurance, les F1 n'ont remporté des victoires que dans des épreuves espagnoles face à une maigre concurrence. De toutes façons, elles étaient en bout de développement. Ce n'étaient que des 2 soupapes et les fonderies des carters moteur étaient restées très proches de celles du 500 Pantah avec quelques nervures de renfort supplémentaires. La Honda RVF V4 présentée en 1984 était au dessus du lot, elle disposait de 115 hp à 11500 rpm.
Par ailleurs, beaucoup de chiffres très exagérés ont été annoncés par Taglioni quant à la puissance de ces machines, tout comme il l'avait souvent fait auparavant, avec les soit disant 78 hp des 600 TT2 par exemple. Mais en réalité, une 750 F1 de série ne développait que 70 hp et les Montjuich et Santa Monica, les plus puissantes des 750 F1 de route, environs 76 hp à 8500 rpm (pour 95 annoncés sur la fiche technique...).
La puissance des 750 F1 avait été limitée par un taux de compression réduit à 9,3/1 dans un souci de fiabilité (idem pour les 750 Paso et Sport).
Quant aux 750 usine de compétion, leur puissance se situait au maximum aux alentours de 86 hp au vilebrequin à 9500 rpm. Ces chiffres "réels" sont issus de sources sérieuses et bien informés (revues spécialisées américaines). D'ailleurs en 1985, l'usine offrit un moteur 750 F1 de course à Pat Slinn pour Tony Rutter en vue du championnat TT F1. Pat Slinn releva seulement 79 hp en sortie de boite de vitesse lors du premier passage au banc d'essais.
Pour preuve, dans la course Battle of the Twins en 1985 à Daytona, Lucchinelli ne parvint pas à prendre l'avantage sur la Harley-Davidsonn 1000 XR à culbuteurs de Gene Church et dut se contenter de la 2-ème place. Préparée par O'Brien, la XR développait plus de 90 hp et dépassait les 250 Km/h.
Lucchinelli dut attendre 86, et l'arrivée du prototype F1 851 cc 2 soupapes donné pour 95 hp, pour s'imposer enfin dans cette épreuve. Il remporta également la victoite à Santa Monica et à Laguna Seca en Californie.
Remarque: une 750 F1 préparée aux USA aux alentours de 2010 a atteint 93 hp à 9500 rpm, grâce à des carburateurs de 41, des pistons procurant 12 de compression, de grosses soupapes, des arbres à cames de ST2 et un échappement soigneusement calculé. C'est probablement le record, car cela implique une pme de 10,5 bars, ce qui est énorme pour un deux soupapes refroidi par air. Le chiffre de 86 hp en sortie de boite de vitesse atteints par l'usine en 1985 est donc plus plausible que les 94 hp annoncés par Taglioni pour les 750 F1 les plus poussées.
(voir cet artice en anglais très intéressant à ce sujet extrait du site Pantaheads, mais ce site a peut-être disparu de la toile)
Une parenthèse théorique:
La pme, qui est obtenue par calcul, est la valeur moyenne de la pression qui s'exerce sur le piston durant le cycle à un régime donné. On la calcule généralement au régime de puissance maxi. La pression maximum peut atteindre des valeurs de l'ordre de 60 bars.
La valeur de cette pme dépend du remplissage des cylindres en mélange carburé lors de l'admission et de l'efficacité de la combustion qui doit être le plus complète possible. La richesse du mélange carburé à également une grande importance, elle doit être le plus proche possible de la stochiométrie, soit 14,7 g d'air pour 1g d'essence.
Formule de calcul: P = k x V x n x pme
avec P = puissance, k = coefficient de calcul, V = cylindrée, n = vitesse de rotation.
(k = 0,746 si P est exprimé en chevaux, V en litres, n en tours/seconde et mpe en bars)
(exemple: Ducati Panigale 1285 cc, 205 hp à 10.500 rpm: pme = 12,2 bars)
Á condition que les pertes par frottement soient précisement évaluées, le calcul de la pme permet de connaître le rendement thermique d'un moteur, indépendamment de la cylindrée.
L'une des pme les plus élevées obtenue sur un moteur non suralimenté se situe aux alentours de 17 bars. C'est celle qui a été atteinte en 2005 sur les moteurs 3 litres V10 de Formule 1 (Ferrari, Renault et Honda) qui développaient 900 hp à 19.000 rpm.
Accessoirement, celà prouve que la puissance potentielle d'un 4 cylindres 1000 cc de Moto GP se situe aux alentours de 300 hp.
Nota: dans le cas d'un moteur suralimenté, la pme peut atteindre 30 bars (Renault 1500 V6 turbo F1, plus de 1200 hp en mode "essais").
La première victoire du desmo 4 soupapes:
En 1987, avec la version 851 cc du desmo 4 soupapes encore sans appellation officielle, Marco Lucchinelli remporta la victoire dans les deux épreuves du championnat Américain "Battle of the Twins" (Pro-Twins) où elle fut engagée, les plus prestigieuses: une première à Daytona en Floride le 6 Mars, et autre le 12 Juillet sur le circuit de Laguna Seca près de Monterey en Californie.
La preuve était faite, la desmo 4 soupapes était une gagnante ! La meilleure 1000 Harley-Davidson de la course ne fit pas mieux que 3ème derrière la 851 Tecfar Ducati F1 de Caracchi (voir cette page au sujet de ces Harley-Davidson).
Á Laguna Seca, Luchinelli l'emporta devant Doug Brauneck sur une 1000 Moto Guzzi préparée par "Dr John". Cette fois la presse en fit grand étalage un peu partout dans le monde et ces victoires furent décisives pour la suite du projet un peu terni par l'abandon au Bol d'Or.
De plus, la marque toujours mal en point avec les 750 Paso et F1, difficiles à vendre pour seuls modèles de pointe depuis l'abandon des couples coniques, avait été rachetée racheté depuis par Cagiva. Elle avait bien besoin de l'arrivée de cette nouvelle technologie pour renforcer son prestige.
En 1987, l'usine mettra fin à son engagement en Formule TT et les dernières 750 F1, les Laguna Seca et Santa Monica seront construites en 88.
le podium avec au centre, Gianfranco Castiglioni, le patron de Cagiva et à droite, Rino Caracchi de NCR, le père de Stefano
Marco Lucchinelli victorieux à Daytona en 1987 devant Stefano Caracchi sur la Tecfar-Ducati F1/851 cc
Pour la petite histoire, Caracchi avait dépassé Luchinelli durant le 7-ème tour à Daytona, mais la course fut interrompue à cause de la présence d'huile sur la piste, comme il était de règle au USA à l'épque. Caracchi fut alors rétrogradé à la seconde place, position qu'il occupait lors du dernier passage de la ligne d'arrivée avant l'interruption. Lucchinelli a eu de la chance de l'emporter. Malgré son moteur 851 2 soupapes refroidi par air, la Tecfar était très rapide.
Voir sur la photo ci-dessous, Caracchi en passe de dépasser Luchinelli. La n° 26 en troisième postion est la Ducati Mille préparée par Reno Leoni et pilotée par Jimmy Adamo.
Le championnat BOTT Américain avait été dominé durant plusieurs années dans la catégorie reine, les Pro-Twins, par les très rapides Harley-Davidson des sorciers américains de la préparation. Avec leurs 100 hp, les 1000 XR "Lucifer's Hammer" étaient capables d'atteindre 260 Km/h sur la ligne droite de Daytona. De 1982 à 1985, les Ducati 900 et "Mille" de Leoni, les 1000 Guzzi Daytona 4 soupapes de Dr John et les Harley-Davidson préparées par O'Brien remportérent tour à tour le championnat.
la "desmo 4V" 851 cc version "Battle of the twins" avec l'échappement 2 en 1
les carters sont encore ceux de la 750 F1
Entre-temps, la desmo 4 fut engagée dans divers championnats nationaux en Italie (vitesse, BoT et montagne) et y remporta plusieurs titres. En cours de saison, l'échappement 2 en 1 fut équipé d'un mégaphone supplémentaire du coté gauche, cette configuration sera conservée par la suite. C'est à cette époque qu'il fut décidé de nommer officiellement cette machine Ducati 851.
la 851 desmo 4 exposé au musée Ducati dans la version engagée en Italie 1987
Les premières "Superbike":
La "851 proprement dite" arriva en 88 avec un tout nouveau bas-moteur, les carters de F1 n'étaient plus à même de supporter des chevaux supplémentaires. Les cylindres et les culasses étaient semblables à ceux de 1987, mais les carters étaient plus solides et plus volumineux en vue d'éventuelles augmentations de cylindrée. A cette occasion, la capacité d'huile fut revue à la hausse et une boite de vitesse à 6 rapports fut adoptée.
Pour améliorer le fonctionnement de l'injection, les cornets d'admission furent coiffés d'une boite à air comme les moteurs de Formule 1. Dans cette nouvelle version, la puissance s'élevait à 125 hp à 11.000 rpm. Par ailleurs, le radiateur d'eau fut remplacé par un modèle courbe et de plus grande taille emprunté à la 500 Cagiva 2 temps de GP. Il fallait enfoncer le clou pour pouvoir exploiter tout le potentiel du "quattro valvole" à injection.
Ces carters avec la boite de vitesse à 6 rapports, seront ensuite utilisés sur la gamme des nouveaux "gros" deux soupapes de série, désormais équipés de courroies crantées comme les 750 F1 et Paso. La 906 Paso est lancée en 1988 en même temps que les 851 de route à 4 soupapes dont il est question plus bas. Elles seront suivies en 1989, par la 900 SS et en 1993 par la 900 Monster (appelée Monstro au début), deux modèles qui ont définitivement relancé la marque.
Par ailleurs, cette année 88 marque un tournant. En effet, les culasses arrières "retournées" apparues en 1985 sur la 750 Paso avec les admissions au milieu de V, sont dorénavant montées sur tous les modèles "petits blocs" et "gros blocs" confondus. Présentée en 88, la 750 Sport qui remplace la 750 F1, adopte ce montage en reprenant le moteur de la Paso. Cette évolution, adoptée pour satisfaire aux normes de pollution, fut une abérration technique sur des moteurs refroidis par air pour des raisons évidentes de refroidissement du cylindre arrière. C'est pour cette raison que la ST2, présentée en 1997 fut pourvue d'un refroidissement liquide.
D'ailleurs, avec l'arrivée de la 900 SS, le refoidissement des cylindres sera partiellement assuré par circulation d'huile sur tous les modèles pour minimiser les inconvéniants de cette disposition. C'est à cette époque que Ducati abandonnera les carburateurs Dellorto, trop rudimentaires pour satisfaire aux normes de pollution. Les Weber double corps de 44 des 750 Paso et Sport seront remplacés par des Mikuni de 38 à dépression plus éfficaces à partir du lancement des 750 et 900 SS. Quant à l'injection électronique, elle équipe toute la gamme Ducati depuis 2002.
Pour l'anecdote, j'ai vu tourner aux 30 ans du Ducati Club de France une 600 TT2 équipée de Mikuni de 38 à dépression du même type que ceux des 900 SS à courroies crantées, elle marchait très fort. Lorsque j'ai intérrogé son préparateur sur ce choix, il me répondit: les Dellorto c'est des "arrosoirs". Par ailleurs, les Kehin FCR sont le meilleur choix, ils apportent un plus très net sur les modèles à carburateurs. De plus, il est possible de les monter en position quasi verticale (photo ci-dessous).
Pour l'homologation dans le championnat du monde de Superbike nouvellement créé, les premières version routières des 851 Superbike seront construites fin 1987.
le prototype de la 851 "Strada"
En 88, seront présentées la 851 "Strada" rouge produite en 300 exemplaires et la 851 "Kit" tricolore plus puissante, produite en 200 exemplaires et destinée aux clients qui voulaient s'engager en compétition. Un deuxième injecteur disposé en douche sera monté sur les 851 "Kit" et sur les machines d'usine pour gagner en puissance à haut régime.
En cours d'année, viendra s'ajouter une petite série de 17 "Lucchinelli Replica" 888 cc destinées à valider cette cylindrée en compétition. La "Strada" développait environs 90 hp à 9000 rpm et la "Kit" un peu plus de 100 hp à 10.000 rpm, tout comme la "Replica" 888 cc (chiffres vérifiés).
A cette occasion, le dessin de cadre sera partiellement modifié par rapport au prototype de l'année précédente. Par la suite, les 851 Strada seront équipées de roues avant de 17" comme les autres modèles, au lieu de 16" sur les premières.
La gamme Ducati 1989 était donc composée de la 750 Sport, de la 851 dans ses diverses versions, de la 906 Paso et de la 900 SS.
la 851 "kit" tricolore et la "Lucchinelli Replica" 888 cc
Les épreuves du championnat du monde Superbike étaient ouvertes aux bicylindres de 1000 cc maxi et aux 4 cylindres de 750 cc maxi, avec des poids minimums de 140 et 160 Kg. Par ailleurs, les machines devaient conserver de nombreux éléments (notammment le vilebrequin et les pièces de fonderie du moteur ainsi que le cadre) d'un modèle de série produit à un minimum de 200 exemplaires. La formule TT F1, en perte de prestige par rapport au championnat Superbike, disparaîtra en 1990 en même temps que les épreuves "Battle of the Twins" internationales.
Par ailleurs, avant la création du championnat du Monde en 1988, de séries SBK existaient déjà aux USA et dans certains pays d'Europe et du Commonwealth.
l'une des 7 machines d'usine construites en 1988
Grâce à ses 125 hp, à son couple moteur et à sa relative légèreté avec ses 150 Kg, la Ducati 4 soupapes s'avéra d'emblée la plus rapide. Pourtant, c'était la seule bicylindre du plateau, et elle souffrait d'un handicap de cylindrée de 150 cc par rapport aux 1000 cc autorisés (en comparaison, la 750 V4 Honda RC 30 développait 130 hp et pesait 166 Kg). En cours de saison, grâce à une nouvelle augmentation de cylindrée à 888 cc avec un alésage porté à 94 mm, la puissance de la Ducati atteignit 130 hp à 10.500 rpm.
Lucchinelli remporta la course inaugurale en 1988 à Donington Park en Angleterre (photo ci-dessus). Mais, les débuts en Superbike furent difficiles car la 851 portée à 888 cc rencontra des problèmes de fiabilité avec des bris de carters, mis à rude épreuve par le concept moteur porteur, et des soucis récurrents de capteurs de système électronique. Lucchinelli remporta tout de même 2 victoires cette année là, mais l'usine décida d'interrompre sa participation au championnat en cours de saison pour travailler sur ces faiblesses.
En 89, Raymond Roche, nouvellement intégré à l'équipe, remporta 5 victoires et Lucchinelli prendra sa retraite de pilote à 36 ans en fin de saison. Il remplira la fontion de Team Manager durant l'année 90. Il aura fallu deux années pour venir définivement à bout de ces divers problèmes. Durant cette période, la fourche Marzocchi M1R fut remplacée par une Ohlins de type inversé plus moderne. Sur la 851 "Strada" de base, il faudra attendre 1991 pour voir apparaitre une fourche inversée, une Showa japonaise.
A partir de 1989, année où Bordi fut nommé directeur technique, l'usine commença à produire de vraies versions compétition-client poussées d'origine à 888 cc:
-D'une part, les "SP" (Sport Production), qui remplaçaient les 851 "Kit". C'étaient des machines homologuées pour la route et plus évoluées à la base que les "Strada". La 851 SP2 de série développait 116 hp à 10.000 rpm en 1990. Ces machines pouvaient être encore améliorées grâce à ensemble de pièces "racing" disponible au catalogue.
-D'autre part, les "Corsa", préparées sur commande par le département compétition. Ces "production racers", produits en quelques dizaines d'exemplaires spécialement pour des écuries de pointe, étaient très proches des machines officielles. La 851 "Corsa" de 1990 développait 128 hp à 10.500 rpm et les machines d'usine 134 à 11.000 rpm.
la 851 SP2 la 851 Corsa
Les années glorieuses:
Depuis le titre remporté par Raymond Roche avec 7 victoires en 1990 (photo ci-dessous), Ducati a été 17 fois champion du monde des constructeurs et a remporté plus de 380 victoires et 1000 podiums en mondial Superbike avec 14 titres de champion des pilotes, sans compter ses innombrabres succès dans des champoinnats nationaux. Une 888 préparée par NCR remporta deux titres consécutifs aux USA en AMA Superbike en 93 et 94 avec Doug Polen et Troy Corser.
Aucun autre constructeur n'a remporté autant de titres et de victoires en championnat du Monde de Superbike.
Chaz Davies dans les années 2000.
Il a vraiment été flamboyant à son meilleur niveau sur la Ducati. Certains jours, il était imbattable-au dessus du lot, mais il n’a pas su ravir le titre.
(voir cette page de 2022 au sujet des records de Ducati en WSBK)
En 1993, seront lancées en série les 888 Strada et SP5, les ultimes modèles de ces premières Ducati Superbike de série. Les moteurs seront dorénavent dénommés "desmoquattro". Sur les 888 SPS, produites à un centaine d'exemplaires, et sur les Corsa, l'alésage sera augmenté à 96 mm, ce qui portera la cylindrée à 926 cc (96 x 64 mm). La puissance atteindra alors 144 hp à 11.500 rpm sur les machines d'usine.
le moteur de la 888 "Corsa" de 1993
la 888 Corsa 926 cc
En 1994, Massimo Bordi sera nommé directeur général de Ducati par Claudio Castiglioni, le PDG de Cagiva. Il procédra à une refonte du département compétition sous la forme d'une structure semi-indépendante et dotée de moyens plus importants qui prendra le nom de "Ducati Corse". Virginio Ferrari sera chargé de diriger ce nouveau département. Cette période sera décisive pour la marque, tant par ses victoires en Superbike, que par le succès commercial des 600 et 900 Monster nouvellement lancées.
La mythique 916 (94 x 66 mm), dessinée par Tamburini, arrivera cette année là, accompagnée de deux versions spéciales mieux équipées et plus puissantes, les S et SP. La partie cycle sera totalement refondue, avec un cadre inspiré du Cobas TF 3, ainsi qu'une suspension arrière du type monobras. Cette 916, qui sera très appréciée par la clientèle, est consisérée par beaucoup comme un évenement décisif dans la lignée des modèles sportifs de la marque.
En compétition, c'est une version 955 cc (96 x 66 mm) qui sera engagée, et la puissance atteindra alors 150 hp à 11.00 rpm avec un poids réduit à 145 Kg. Pour homologuer cette modification, un modèle routier dénommé 955 SP) développant 124 hp à 10.200 rpm sera produit en 54 exemplaires, un minimum de 50 machines produites étant dorénavant éxigé pour valider une augmentation de cylindrée en compétition. 50 de ces 955 seront vendues aux USA sous l'appellation 916 SP-A, comme "America" et pratiquement toutes les machines produites seront préparées pour la course.
Virginio Ferrari, Claudio Castiglioni et Massimo Bordi présentant fièrement la nouvelle 916 d'usine
Une opération identique sera menée en 1995, avec la 916 SPS produite en série limitée. Également destinée à valider une nouvelle augmentation de cylindrée pour les machines d'usine, elle sera dotée de nouveaux carters renforcés et élargis permettant de porter l'alésage à 98 mm et la cylindrée à 996 cc. Une SPS préprarée pour la course pouvait atteindre 134 hp à 10.500 rpm et les machines d'usine 155 hp à 11.500 rpm.
La 996 de série arrivera en 1996, ce sera la dernière "desmoquattro" avant l'arrivée des "testastretta" (culasse étroite) en 2002. Les versions spéciales seront dorénavant repérées "R" et "RS" à la place de "SP" et "Corsa". Par ailleurs en 2001, le moteur "desmoquattro" de la 916 sera également monté sur la Monster avec l'arrivée de la S4.
A partir de 2001, le machines d'usine seront repérées "F" comme "Factory": F01 pour 2001, etc. Et en 2002, avec l'arrivée de la 998, le sigle "desmoquattro" a été remplacé par "testastretta" (culasse étroite) à cause d'angle réduit à 24° entre les soupapes (voir en page 3). En 2003, 200 hp à 12.000 rpm seront atteints avec la 999 F03. En 17 années d'évolution la puissance du "desmo 4V" a doublé par rapport au premier prototype ! Les 1198 F10 dépasseront les 220 hp (photo ci-dessous).
En 2008, le règlement technique a changé. Pour coller au marché, sont admis en WorldSBK les bicylindres jusqu'à 1200 cc et les 4 cylindres jusqu'à 1000 cc, avec un poids minimum unique et des brides à l'admission pour les bicylindres. En conséquence, les 1000 Aprilia, BMW et Kawasaki dominent, mais il est clair que la différence n'est plus équitable. Les 4 cylindres, plus puissants que le twins d'environs 15 %, sont avantagés. Pour cette raison, Ducati Corse se retira officiellement de ce championnat en 2010, pour se concentrer sur les Moto GP, et se contenta de fournir des machines à des teams satellites semi-privés jusqu'à l'arrivée de la Panigale V4R en 2018.
En 1992, un monocylindre horizontal de compétition dérivé de la 888, le "Supermono", sera conçu par Bordi et Domenicali. Décliné en 550 puis en 575 cc (100 x 70 mm et 102 x 70 mm), il sera produit en 67 exemplaires. Ce modèle était destiné aux pilotes privés qui s'engageaient dans les épreuves de la coupe Européenne Supermono créée en 1987, un championnat similaire appelé "SoS" (Sound of the Singles) était d'ailleurs organisé aux USA. Malgré sa cylindrée réduite, le "Supermono" conquit de nombreuses victoires grâce sa tenue de route hors pair et son rapport poids/puissance, il remporta 5 titres dont le championnat d'Europe en 1993.
La limite maxi était fixée à 800 cc et de nombreuses machines spéciales à moteur Honda ou Yamaha modifiés atteignaient 750 cc.
Bordi espérait faire produire en petite série une version homologuée pour la route, d'ailleurs l'emplacement d'un démarreur était prévu dans les fonderies de carters. Dans ce but, il conçut un prototype refroidi par air avec un carburateur Mikuni à dépression à la place de l'injection, un tel moteur aurait pu développer environs 60 hp (photo ci-dessous). Mais, peu convaincue que ce modèle intérèsserait la clintèle, la direction ne donna pas son feu vert.
Le moteur comportait un système d'équilibrage très original, breveté par Bordi, constitué d'une deuxième bielle reliée à contrepoids oscillant à la place du cylindre vertical. Grâce à ce système, il prenait 11.000 rpm et, en version 575 cc, il atteignait 75 hp à 10.000 rpm en sortie de boite de vitesses, soit 130 hp/litre, un record pour un monocylindre 4 temps de cette cylindrée à l'époque. Toutefois, la plage de régime exploitable était réduite, car puissance n'arrivait pas avant 7000 rpm. Mais avec l'échappement "usine" à deux sorties le moteur était beaucoup plus exploitable. Enfin, la machine ne pesait que 123 Kg à sec.
Bien sûr, ces "Supermono" sont devenus des machines de collection et participent à des épreuves historiques.
BMW à repris ce principe avec un système comparable sur le F 800 parallel-twin, comme Yamaha sur le moteur du Scooter 500 T Max, mais avec un troisième piston.
(une page intéressante en anglais au sujet de l'histoire du Supermono avec de belles photos)
Par ailleurs, il en existe une réplique moderne très fidèle, homologuée pour la route et produite en Angleterre. Cubant 595 cc (104 x 70), elle développe 70 hp à la roue arrière à 9800 rpm (soit environs 85 au vilebrequin), grâce à un cylindre, une culasse "testastretta" et un corps d'injection de 999 R. Cette réplique est construite par Britaliamoto, un spécialiste de ces machines, qui est à même d'en produire une trentaine grâce au stock de carters que Ducati avait conservé et a accepté de lui céder. Un essai de cette machine dans la revue "Desmo", lisez le: cette réplique est une petite merveille d'efficacité (ci-dessous une photo de son moteur en cours d'assemblage).
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(Notons qu'avec une culasse, un cylindre et un piston Ø 116 mm du moteur 1284 cc Superquadro de la Panigale, une nouvelle version 650 cc du Supermono pourrait développer un peu plus de100 hp. D'ailleurs en 2010, les F10 WSBK d'usine 1198 cc atteignaient 220 hp à 12.000 rpm.)
L'ascension de Bordi:
C’est cette "4 valvole" 851 qui permit à Massimo Bordi de s’imposer vraiment en tant que nouvel ingénieur en chef en 1985, alors qu'il était en concurrence pour ce poste avec Giuseppe Bocchi, un ingénieur motoriste italien de grande renommée. Après avoir été employé chez Lamborghini, puis chez Ferrari et MV Agusta, où il avait travaillé sur des moteurs champions du monde avec Niki Lauda et Giacomo Agostini, il avait participé à l'étude du moteur Pantah à la fin des années 70. Par la suite, Bocchi se consacra à plein temps à BRD, la société d'ingénierie qu'il avait créée en 1980.
Bocchi était plus experimenté, mais Bordi était un "enfant chéri de la maison" chez Ducati: les victoires en course de sa nouvelle 851 lui procuraient un immense prestige. Il sera nommé directeur général en 1994.
Bordi démissionnera de Ducati fin 2000 lorsque Cagiva, en difficultés financières, cédera toutes ses parts à Texas Pacific Group, un fond de pension déjà actionnaire majoritaire de Ducati depuis 1996. Cette décision de Bordi sera motivée par le refus de cet investisseur de le nommer PDG. C'est finalement Federico Minoli, une homme d'affaires plus en accord avec la nouvelle politique commerciale des Américains, qui sera reconduit en 2001 dans ce poste où il avait été nommé en 1996.
Quant à Bordi, après avoir été président des diverses sociétés de matériel agricole, il a été recruté en 2019 comme vice-président exécutif dans le cadre d'un remaniement de MV Agusta qui appartient désormais à des Russes, la famille Sardarov.
Bordi, directeur général de Ducati en 2000
A l'époque, deux projets pour un modèle "haut de game" s’étaient affrontés chez Ducati: le 851 "quattro valvole" de Bordi et le 994 "doppio-Pantah" de Taglioni. Celui-ci faisait tout pour s'opposer au projet de Bordi parce qu'il voulait absolument produire ce double Pantah très prometteur au banc d'essais avec 105 hp à la roue, un V4 aurait été le chef-d'oeuvre de sa carrière. Mais "il dottore" souffrait de problèmes de santé (depuis 83 il travaillait à mi-temps à l’usine), et au vu des performances du bicylindre 4 soupapes, la direction de Cagiva, le propriétaire de Ducati à l'époque, estima à juste titre qu’un V-twin moderne était plus comforme à l’image de la marque que le V4 bi-Pantah, d'ailleurs mis en veille depuis 1984. Fin 1987, peu de temps avant le départ en retraite de Taglioni, les dés étaient jetés, une nouvelle ére commençait à Bologna avec la décision de produire en série des versions routières de la 851 desmoquattro et le projet doppio-Pantah fut définitivement abandonné.
Finalement, même si l'Apollo et le double-Pantah ont tourné au banc d'essais et si Taglioni a dessiné plusieurs autres V4, celui-ci n’a jamais pu concrétiser son rêve d'engager un 4 cylindres en V en compétition ni d'en produire un en série. Mais l’histoire lui a rendu justice avec le "desmo 16" de Preziosi et la Panigale V4.
certaines des photos proviennent du "Rudi’s Pantah Site
La naissance du prototype:
Taglioni, Bordi, Mengoli et Farnè à moitié caché en Aout 86 devant la 750 IE en cours de construction
(Taglioni en semi-retraite est déja marqué par la maladie)
les culasses marquées "desmo 4V dohc " et le carter d'alternateur de 750 F1 modifié pour la pompe à eau
Le récit qui suit est extrait d'interviews de Massimo Bordi et Gianluigi Mengoli qui racontent comment est né le moteur Ducati "desmo quattro valvole" à injection électronique et refroidissement par eau.
Tout à commencé début 1985. Les études préliminaires du moteur durent être effectuées en secret du fait de l'opposition de Taglioni à ce projet. Mengoli qui travaillait sur un autre projet, dût faire les premiers dessins chez lui en dehors des heures de travail pour s'éviter le courroux du patron !
Bordi soumit son projet à Cosworth, mais les anglais proposérent de concevoir des culases à distribution classique, car à leur avis le système desmo était trop compliqué et surtout trop encombrant pour permettre de réduire suffisamment l'angle entre soupapes. De plus, Cosworth demandait des millions de Lires pour cette étude et l'affaire en resta là.
Sur les moteurs Cosworth dotés de ressorts de soupapes, l'angle entre celles-ci s'établissait à 30°, mais à cause de la distribution desmodromique Bordi dut se contenter de 40°.
Ensuite, dès le feu vert de la direction, Taglioni laisse enfin travailler Bordi et son équipe, il participe même de loin au projet. Durant cette période, de Septembre 85 à Mars 86, trois ingénieurs furent impliqués aux cotés de Bordi: Mengoli, Domenicali et Martini. Le tout premier moteur prototype fut un 750 Paso doté du refroidissement liquide et de l'injection, afin d'avancer dans la mise au point de ces solutions. Des culasses à 2, 4, 5 et même 6 soupapes furent étudiées, mais c'est finalement la solution "dohc desmo 4 valvole" qui s'est avérée la plus efficace. Des versions refroidies par air et par eau furent également comparées.
Culasses brutes de fonderie 4 soupapes desmo refroidies par air vues à l’usine
Ensuite, aussitôt le projet finalisé, tout se fait très vite. Une option est prise pour le Bol d'Or, une épreuve d'endurance de 24 heures qui se déroule en France les 20 et 21 Septembre, afin de tester le prototype en compétition avant la fin de la saison. En Mai les dessins de fabrication sont terminés et le brevet de Bordi et Mengoli est déposé en Italie le 19 Mai 1986. Comme le bas-moteur de la F1 est conservé, la réalisation du 4 soupapes ne prends que deux mois et il est démarré pour la première fois fin Juillet. Après quelques jours de réglages sur le banc d'essais, la puissance atteint 93 hp à 9500 rpm, soit pratiquement autant que la 851 cc 2 soupapes.
au premier plan, posé sur un chiffon, le boitier d'injection Weber-Marelli qui sera fixé à droite de la culasse avant
Le cadre est un Verlicchi de F1 d'usine fortement modifié à cause de l'encombrement des culasses, la culasse arrière ne passait en hauteur et celle de l'avant touchait la roue, seules les parties rouges qui apparaissent sur la photo ont été conservées. Il a été construit par Franco Farnè et Massimo Bordi avec les conseils de Roger Manning, un ami anglais spécialite des cadres de moto.
le cadre Verlicchi des F1 d'usine
Franco Farnè et d'autres techniciens durant le montage à l'atelier prototypes
un mécanicien, Bordi, Martini, Mengoli, Roger Manning sur la moto et Farnè à droite
Aussi tôt, les tout premiers roulages sont effectués dans la cour de l'usine, en utilisant provisoirement une partie-cycle de 750 Paso, parce que les culasses plus hautes ne rentrent pas dans le cadre F1. Il demande à être profondément modifié, mais faute de temps pour en construire un neuf, c'est un cadre standard qui est scié et ressoudé à la demande. Enfin, le 30 Août le prototype est achevé et mis en route grâce à l'inusable Farnè chargé de diriger la construction et les réglages. C'est lui qui effectue les premiers essais sur la piste de l'usine.
Du début à la fin, c'est la course contre la montre. Bordi à expliqué qu'avec les moyens ridicules frisant l'artisanat dont l'équipe disposait pour cette opération qui n'était qu'une option à valider, ce fut une aventure qui mériterait d'être inscite dans la légende. Des premiers dessins de fabrication jusqu'à la fin du montage de la moto, il s'est passé à peine 5 mois: un prototype aura rarement été réalisé en si peu de temps. Dans l'urgence, le moteur et le cadre sont produits en un seul exemplaire.
Finalement, les essais et les dernières mises au point sur piste ont lieu secrêtement sur le circuit du Mugello proche de Bologna début Septembre, avec Virginio Ferrari au guidon et en présence de Bordi, de Farné et de techniciens de Weber-Marelli (photos ci-dessus). Quelques jours seulement avant le Bol d'Or, la 748 "IE" est prête à courir !
la moto nue photographiée dans la cour de l'usine
Les débuts en course:
Mengoli au départ du Bol d’Or 1986
ravitaillementde nuit
La suite de l'histoire: la victoire à Daytona en 1987
Marco Luchinelli victorieux à Daytona en 87 sur le prototype 851
Il précède deux autres Ducati: Stefano Caracchi, le fils "NCR", qui finira en deuxième position sur la Tecfar NCR 851 cc et l'américain Jimmy Adamo sur la "Mille" préparée par Reno Leoni.
Le podium de Daytona 1987:1 Marco Luchilelli Ducati n°618, 2 Stefano Caracchi Tecfar Ducati n°621, 3 Scott Parker Harley Davidson n°114
Daytona 1986, l'une des dernières grandes victoires de la F1:
à gauche la pré-grille, Paul Lewis à coté de Lucchinelli à l'arrivée sur la photo du milieu, on reconnait Taglioni tenant la coupe sur la photo de droite
sur le pré-grille de départ : Lucchinelli, Adamo et Caracchi portant les mêmes numéros qu'en 87 sur trois machines engagées par Ducati avec le Team Leoni Racing: une F1 851 (92 x 64 mm), une F1 818 (92 x 61,5) et la F1 Tecfar 750.
Lucchinelli remportera la victoire, Adamo en lutte pour la deuxième place chutera suite à un accrochage avec Paul Lewis et Caracchi tombera en panne d'essence peu avant l'arrivée et finira à la 5-ème place (voir la video de cette course). Paul Lewis, un pilote australien qui s'était distingué en BOTT sur 1000 Moto Guzzi, finira deuxième sur la Quantel Cosworth.
Une petite parenthèse sur cette intéressante machine:
La Quantel Cosworth, qui était dérivée de la décevante NVT Challenge de 1975, plus connue sous le nom de 750 Norton Cosworth, développait 120 hp à 10.500 rpm et pesait 173 Kg. C'était une des rares machines à même d'inquiéter les Ducati, avec son parallel-twin 4 soupapes à refroidissement liquide.
Bob Graves, l'un des créateurs de Quantel, une entreprise britanique de matériel de radio diffusion, était également président du conseil d'administration de Cosworth. Après avoir récupéré des moteurs 750 restés à l'usine, il chargea John Surtees en personne de superviser la construction de cette machine vers 1985, avec Guy Pearson, John Baldwin et le mécanicien Gary Flood. Le projet fut financé par Quantel. Pour gagner en fiabilité et en puissance, il fut décidé de modifier le moteur JBB, d'augmenter sa cylindrée à 823 cc et de monter un système d'injection Cosworth. Keith Duckworth, le directeur de Cosworth, proposa que ce travail soit sous-traité chez Ilmor Engineering (en 1991, Ilmor produisit un V10 de Formule 1 pour l'écurie Sauber. Mercedes racheta de département F1 d'Ilmor en 93 pour établir une collaboration technique qui se poursuivit jusqu'en 2005).
Afin de réduire le poids, une partie cycle à cadre monocoque en tôle d'aluminium rivetée fut réalisée par Exactweld dont les ingénieurs avaient travaillé pour l'ancienne écurie Surtees de Formule 1.
La Quantel Cosworth fut engagée en compétition lors des saisons 86, 87 et 88 dans quelques épreuves "Battle of The Twins" en Europe et en Amérique du nord. En 87, elle fut victime d'ennuis techniques à Daytona. Durant ces années, elle fut pilotée tour à tour par l'australien Paul Lewis, le champion australien de Superbike Robbie Phillis et l'anglais Roger Marshall.
Garry Flood, Bob Graves et Robbie Phillis en 1987
C'est en 1988, aux mains de Roger Marshall, que la Quantel Cosworth sera la plus glorieuse. Il remportera la victoire dans la course de Daytona, renommée "Pro twins GP", en s'offrant même le luxe de battre la Ducati 851 Superbike de Stefano Caracchi qui finira en deuxième position. Cette année là, Marshall vaincra également en BOTT sur la Quantel à Spa Francorchamps en Belgique et à Assen aux Pays-Bas. Mais le championnat du monde de Superbike avait été créé entretemps, la concurrence n'était plus très élevée en Battle of the Twins et ces épreuves disparaitront en 1990.
C'est d'ailleurs très dommage, car du coup, il n'existe plus d'épreuve de vitesse pure pour les prototypes de grosse cylindrée en dehors des MotoGP.
La plus puissante des Ducati à couples coniques: la Mille Leoni Racing
L'usine Ducati n'engaga la 851 "quattro valvole" que dans deux épreuves du championnat américain Pro Twins (ex Battle of The Twins) en 1987, et Jimmy Adamo remporta cette année là 4 victoires et plusieurs podiums sur la "Mille" Ducati du Team Leoni Racing, mais il préféra utiliser la version à cadre Daspa, plus efficace à son goût. Ce fut une des rares "Mille" (initialement 88 x 80 mm) préparées pour la compétition. Réalésée à 1017cc avec des pistons spéciaux haute compression, elle développait 105 hp à la roue et prenait 260 Km/h. Le cadre spécial de la version qui figure sur les photos ci-dessous avait été fabriqué par GPM en Italie.
Au cours des années 80, Adamo remporta plus de 30 victoires et 2 titres dans la catégorie Battle of the Twins aux USA et au Canada avec les Ducati du Team Leoni. Il courut aussi aux USA sur une 500 Cagiva 4 cylindes 2 temps préparée par Leoni, mais il ne participa à aucun Grand Prix du championnat du monde avec cette machine.
Jimmy Adamo trouva tragiquement la mort à Daytona en 1993 lorsqu'il heurta un mur de béton à grande vitesse au guidon de sa Ducati 888.
Jimmy Adamo avec Reno Leoni et ci-dessous, la version 1985 à cadre GPM de la Mille (une jolie vue du cadre en lien)
une autre photo trouvée sur ce site
cette moto est à vendre de belles photos sur ce lien
un cadre Anlais Harris fut testé mais il ne fut pas retenu
voir cet extrait du blog "Loudbike"
Reno Leoni débuta chez Ducati au service prototypes comme pilote d'essais et metteur au point en 1959. En 1965, il s'installa aux USA à la suite d'une mission pour l'usine chez Berliner, importateur Ducati et Moto Guzzi, pour qui il devint l'un des meilleurs spécialistes de machines de course. Il créa ensuite le Team Leoni Racing. Reno Leoni était un génie de la préparation, il accumula les victoires avec ses fidèles pilotes Mike Baldwin (sur Moto Guzzi), Freddie Spencer et Jimmy Adamo (sur Ducati). Par ailleurs, l'usine s'appuyait sur son infrastructure lorsqu'elle engageait des machines en course aux USA.
Il fut également le premier en 1982, à réaliser une version 750 du moteur de la 650 Pantah sur la base d'une Cagiva Alazzurra. Les carters furent réalésés pour permettre le montage de cylindres procurant un alésage de 88 mm. Les pistons et les cylindres spéciaux furent fabriqués aux USA. Ce moteur qui comportait un embrayage à sec NCR, développait environs 85 hp à 9500 rpm. Il fut d'abord testé en compétition sur une Cagiva avant d'être monté sur une Ducati TT-2 modifiée pour reçevoir un pneu arrière plus large avec laquelle Jimmy Adamo se classa 13ème aux 200 Miles de Daytona parmi des 750 Yamaha beaucoup plus puissantes
Voir également cette interview de Reno Leoni.
Leoni et Adamo en 1982 avec la 650 Cagiva Alazzura équipée du moteur modifié en 750. On remarque le cadre spécial NCR.
Extrait d'un article: "Sous la menace de la disparition du championnat TT-2 en 1984, il fallut développer une 750 TT-1. La limite de cylindrée avait été fixée à 750 cc en catégorie F-1 comme en endurance. C'est pourquoi, avec la Pantah 650 SL produite en 1983, Ducati avait homologué un vilebrequin avec une course de 61,5 mm. Les 750 TT-1, produites en 1983 et 1984 utilisaient des moteurs de TT-2 NCR avec avec un vilebrequin de 650 Pantah, des carters réalésés et des cylindres spéciaux procurant un alésage de 88 mm.
une 750 TT-1
une superbe photo de TT-1 en lien
La 750 F1, lancée en 1985, comportait de nouveaux carters renforcés avec un embrayage inversé.
Mais déjà en Mars 1982, Jimmy Adamo avait piloté une TT-2 modifié en 750 par Reno Leoni avec laquelle il avait décroché une 13-ème place aux 200 Miles de Daytona parmi des 750 Yamaha 2 temps beaucoup plus puissantes."
(voir la video en lien).
En 1985, Ducati aurait pu produire une version 750 de la Pantah. Mais Cagiva a opté pour la 750 F1 et la Paso de Tambourini. L'année suivante, Ducati a entamé l'étude d'une version 4 soupapes simple arbre à cames desmo du moteur 750 F1. Ce moteur a été testé en compétition, mais c'est finalement la version 4 soupapes double arbre à cames desmo refroidie par eau et à injection plus puissante de Bordi qui fut retenue pour la 851 lancée en 1987.
la première Mille Leoni à cadres Daspa construite en 1984, en bas la 1000 MHR de série
(les cadres Daspa fabriqués en Italie étaient montés sur les motos d'usine pour la compétition. Ils reprenaient en partie le dessin des cadres de série avec quelques renforts supplémentaires mais, construits en acier au chrome-molybdène, il étaient plus légers)
A présent à la retraite et de retour à Bologna, il se consacre à la mécanique des Ducati de ses amis.
La "Testastretta" (culasse étroite)
Ce nouveau type de culasse, avec un angle entre soupapes réduit à 24,3°, fut dessiné en 2000 pour les 998 par l'ingénieur Marchetti. Il avait travaillé en 89 sur un prototype Ferrari Formule 1 V12 desmo 5 soupapes (photo ci dessous). Le projet "998 testastretta" fut supervisé par Presiozi, l'auteur du V4 desmo 16 et bien sûr, la Desmosedici en a profité, sa distribution reprend ce concept.
Un angle très faible entre soupapes permet de redresser les conduits d'admission (ce qui améliore l'écoulement des gaz, donc le remplissage), mais aussi d'obtenir une chambre de combustion plus compacte, avec des pistons plats, au bénéfice du rendement thermique. Le constructeur de moteurs de Formule 1 Cosworth a été un précurseur en la matière au mimieu des années 60.
Grâce à ce nouveau type de culasse combiné avec d'autres améliorations, les 998R de série atteignaient 150 hp, un "plus" de 25 hp par rapport à la 996R. En 2003, les 999 Superbike F03 officiels dépassérent 200 hp à 13000 rpm, soit 200 hp/litre, ce qui reste un record pour 500 cc de cylindrée unitaire. Un angle de soupapes aussi faible est en lui seul un exploit technique, compte tenu de l’encombrement de la distribution desmodromique 4 soupapes double arbre à cames.
Grâce à des soupapes d'admission plus longues sur les dernières versions dites "Testastretta Evoluzione" introduites sur les 1098 (photo de droite), le conduit d'admission ovale a été légèrement redressé, jusqu'à 35° par rapport à la verticale, mais surtout sa section s'est vue augmentée de 13 %.
Extrait traduit d'une page d'un site italien:
Si on compare avec la coupe de la culasse Ferrari Formule 1 (illustration plus bas dans la section "rapel pneumatique des soupapes), l'inclinaison du conduit d’admission est du même ordre.
Mais Toyota a peut-être fait encore mieux sur ses prototypes desmo de Formule 1, avec les basculeurs et les linguets au centre, ces derniers étant tous les quatre sur le même axe de part et d'autre du puits de bougie. Cette étude a été menée par un ancien ingénieur de Ferrari, Luca Marmorini, qui fut recruté comme chef du département moteurs F1 par Toyota en 1999. Il est retourné chez Ferrari en 2009.
différentes vues du prototype Toyota desmo, une pièce d'orfèvrerie
remarquer le papillon des gaz intégré dans la culasse
à droite la testastertta "evoluzione" : de 40° à 24,3° entre soupapes, le progrès est énorme depuis les premiers dessins de Bordi
1198 testastretta evoluzione
Depuis 2015, Ducati équipe la Multistrade 1200 4 soupapes "testastretta" d'un système de calage variable de distribution progressif agissant de manière séparée sur les poulies d'arbres à cames d'admission et d'échappement (photo ci-dessous).
distribution 1198 "Panigale"
remarquer la chaine et les cames de fermeture moins larges dans la partie ronde
la 800 GP 8 à cadre tubulaire vice-championne du monde en 2008, la GP 9 et la GP 11 à cadre en carbone
(et une photo du jour ou Iannone à jeté Dovizioso en vue d'un double podium)
La Ducati desmo 16 de Moto GP a fait sa première apparition en course en 2002 avec Loris Capirossi. Très puissante, elle a un fort potentiel mais, difficile à dompter, elle a eu une carrière en dents de scie. Néanmoins dès 2003, Capirossi remporta un Grand Prix et la marque fut vice-championne du monde des constructeurs. Ensuite Casey Stoner et la Ducati battront Rossi et sa Yamaha et seront champions du monde en 2007, ils seront vice-champions en 2008. Jusqu'à 2019 la D16 a remporté 50 victoires jusqu' à présent et semble revenue au top niveau après quelques années "sans".
La version routière, la 1000 "Desmosedici RR", a été construite en 1500 exemplaires en 2007 et 2008.
moteurs desmo 16 de Moto GP en cours de montage au département course Ducati
ci-dessus la première version du moteur 990 cc de GP du début des anées 2000 et son impressionnante cascade de pignons
ci-dessus le moteur de la Desmosedici RR de série de 2007: il peut atteindre 220 hp à 14000 rpm après préparation
Diverses versions spéciales plus ou moins "Naked":
la magnifique NCR M 16
une Desmoserici modifiée en Super Motard
version "Streetfighter": prototype unique "Sedicifighter" réalisé aux USA pour un client par Chris Redpath (photos), on est pas obligé d'aimer...
Le rappel pneumatique de soupapes type Formule 1:
Cosworth F1 Ferrari F1 le principe
le moteur Toyota V8 F1 de 2006
Ce principe permet de repousser très loin le régime d’affollement des soupapes en éliminant les phénomènes d’entrée en résonance vibratoire des ressorts. Un autre avantage de ce système, c'est qu'on peut très facilement regler la pression et donc la force de rappel à la valeur nécessaire. Mais les frottements générés par l’ouverture des soupapes restent plus élevés qu’avec le desmo, en particulier avec des profils de cames très pointus. De plus, à cause des fuites inévitables, ce sysyème nécessite une réserve d’azote sous pression à 40 bars pour alimenter les "ressorts" pneumatiques à 12-13 bars via un détendeur. Cette réserve d'azote doit donc être remise régulièrement sous pression. On utilise de l'azote, plutôt que de l'air, parce qu'il est sec et non oxydant. L'utilisation de ce système est strictement réservée à la compétition, après les Formules1 les constructeurs Japonais l'ont adopté sur leurs motos de GP. Au dessus de 15000 rpm, ce sytème est quasi indispensable.
Sur une machine de série, on serait contraint de rajouter un compresseur d'air, mais en plus il faudrait que cet air soit parfaitement propre et sec. Le jeu n'en vaut pas le chandelle...
Les avantages du desmo en comparaison:
Ils sont ailleurs, notamment quant au couple à moyen régime et de la consommation. Ducati l’a largement prouvé: le 1198 F10 Superbike d’usine a été le bicylindre de compétition le plus puissant au monde à son époque avec 220 hp à 11.000 t/min, en conservant néanmoins une bonne souplesse.
Pour ce qui est des Ducati de moto GP, le 990 cc dans la version 2006, atteignait 230 hp à plus de 15.000 rpm, c'était le plus puissant à l'époque. Le 800 V4 de la GP 07 championne du monde en 2007, développait un peu plus de 220 hp à 18000 rpm en version "screamer" (calage de vilebrequin pour explosions régulièrement espacées) avec un régime maxi de 20000 rpm. Quant au 1000 cc des GP 12 et 13, il était estimée à 240 hp, malgré l'alésage limité à 81 mm par le règlement technique alors que la Honda est annoncée à 235 hp (et en 2020, le V4 Ducati a atteint 280 hp).
screamer, big bang, etc... Voir cet article très intéressant à ce sujet.
A titre d'information, le V4 Honda RC 213 V, dont l'angle entre cylindres est à présent égal à 90° comme le Ducati, est annoncé officiellement à plus de 230 hp à plus de 16.000 rpm. Mais ces chiffres sont ceux qui sont divulgués aux médias. En réalité, selon certains experts (bien infommés ?), le V4 Honda développerait environs 250 hp. Preziosi, l'ancien chef de projet Moto GP de Ducati, a lui même affirmé en 2010 que le moteur Honda était le plus puissant de tous à l'époque. Mais Ducati est peut-être contraint de brider son moteur par des moyens électroniques, afin de palier à des problèmes de partie cycle.
Pour 2014, Ducati annonce plus de 235 hp, mais la Desmo 16 est la plus rapide en vitesse de pointe avec 360 Km/h et semble posséder un léger avantage à l'accélération, elle prend quelques fois la tête au départ.
deux versions de la GP 12 avec des cadres en aluminium différents
divers moteurs de Moto GP: Honda RC 211 V5 à 75°, RC 212 V4 à 75°, Yamah R1, Ducati GP 07, GP 05 et le V4 KTM à 70° testé par KR.
Ducati a longtemps été le seul à adopter un angle de 90°, le V4 Suzuki était à 60°, comme le V5 Proton de la KR.
Mais le nouveau Honda RC 213 V de 2013 adopte aussi un angle de 90°. Cela permet d'améliorer la géométrie du chassis grâce au moteur moins encombrent en hauteur et aussi de se passer d'arbre d'équilibrage au bénéfice de la puissance. Contrairement au Ducati incliné vers l'avant, l'axe de symétrie des cylindres est vertical et le bloc moteur est court et très compact.
Cela dit, sur la Ducati GP 13 le moteur a été basculé vers l'arrière, ce qui a permis d'avancer son implantation dans le cadre. Dans le même temps, de nombreux accessoires ont été regroupés vers le milieu de la moto. Ainsi les principaux défauts de la partie cycle ont été corrigés, le poids sur l'avant a été augmenté et l'empattement a pu être diminué (photos ci-dessous).
GP 13 et 14
Ce qu'il en est des avantages du desmo de nos jours:
Les arguments de Taglioni se rapportaient à un système qui utilise un culbuteur pour ouvrir la soupape. Les moteurs modernes haute performance non desmo, que ce soit en moto ou en automobile, comportent un simple linguet (comme d'ailleurs les Ducati "desmoquattro"). Cette pièce n'a pas besoin d'être largement dimensionnée puisqu'elle travaille principalement en compression entre la came et la soupape. Grâce aux logiciels de calcul élaborés (profils polydynes), aux ressorts en aciers spéciaux (ou pneumatiques) et à l'utilisation de matériaux légers, il est parfaitement possible ne nos jours d'adopter des profils de cames presque aussi "pointus" sur les moteurs classiques que sur les desmo. De nos jours, on sait optimiser les variations d'accélération (jerk) de la soupape.
Dans ces conditions, les principaux avantages du desmo restent une diminution des contraintes sur les organes de distribution, ce qui permet d'adopter des profils de cames et des diagrammes de distribution un peu plus agressifs au bénéfice du remplissage en restant à l'abri des vibrations de ressorts. On note également un effort d'entraiement réduit des arbres à cames à bas et moyen régime, du fait du tarage très faible du petit ressort de rattrapage de jeu. Les bénéfices se situent principalement au niveau du couple moteur à moyen régime et de la consommation.
Ducati est aujourd'hui le seul à utiliser ce système. C'est avant tout son image de marque, mais il semble néanmoins que le moteur desmo 16 de moto GP soit potentiellement un peu plus performant que ses rivaux Honda et Yamaha. Pour en être certain, il faudrait comparer les courbes de couple et de puissance qui sont, bien sûr, tenues secrètes.
Alors, si Honda et Yamaha n'adoptent pas la distribution desmodromique, c'est surtout parce que ce n'est pas leur culture, et qu'ils arrivent à gagner des courses quand même grâce à leur grande maîtrise de la technologie des moteurs classiques et des partie-cycles.
Quant aux moteurs de Formule 1, c'est un autre problème. Le régime était limité à 18.000 rpm par le règlement. Dans les années 2000, Toyota a étudié la distribution desmodromique pour son moteur de F1 et noté une augmentation du couple sur certaines plages régime. Mais la mise au point de ce moteur était déjà difficile dans la version à rappel pneumatique des soupapes et Toyota n'a pas voulu prendre le risque de rajouter des complications.
Pour la petite histoire, Ferrari a testé la distribution desmodromique dans les années 90 sur un V12 F1 de 3,5 litres, mais n'a pas persisté dans cette voie, sans qu'on ait su exactement pour quelles raisons.
Cela dit, si les L-twins Ducati "Testastretta" produits en série sont plus performants que leurs concurrents à 4 cylindres, la distribution desmodromique y est sûrement pour quelque chose. Avec le kit Termignoni, la 1199 "Panigale" atteint 205 hp à 11.000 rpm pour 164 Kg à sec, c'est la plus puissante et la plus legère de toutes les "Supersport" de série.
Mais il semble que c'est justement sur les moteurs à grosse cylindrée unitaire dont le régime maximum ne dépasse pas 12000 rpm, que la distribution desmodromique donne les meilleurs résultats. Ce n'est pas aussi évident sur les multicylindres à régime de rotation élevé qui utilisent de petites soupapes. En résumé, on pourrait dire que la distribution desmodromique permet de palier aux inconvéniants des grosses soupapes.
voir cet article intéressant à ce sujet
Les "têtes" de Ducati:
Massimo Bordi, le pére du "desmoquattro", est né en 1949.
Après avoir occupé la fonction d'ingénieur en chef peu après son entrée chez Ducati, il a été nommé directeur technique en 1989 et enfin directeur général en 1994.
Bordi a démissionné fin 2000, alors que Texas Pacific Group a entièrement racheté Ducati à Cagiva, suite au refus des américains de lui céder le poste de PDG à la place de Minoli. Il fut ensuite PDG de Deutz Tractors Italie en essayant d’oublier ses "desmoquattro". Il tenta plus tard de convaincre Harley-Davidson de racheter Ducati à TPG.
Récemment, il vient d'être nommé vice-président de MV Agusta aux cotés du fils de Claudio Castiglione, son ex-patron de l'époque où Cagiva avait racheté Ducati.
L'ingénieur Claudio Domenicali a conçu la 851 desmoquattro et le "Supermono" avec Bordi.
Par la suite, il a été le directeur du nouveau département compétition "Ducati Corse" mis en place par Bordi en 1995. Domenicli a été nommé PDG de Ducati Corse en 1999 (lorsque Preziosi l'a remplacé comme directeur de ce département) et, en parallèle, directeur du département recherche et développement en 2007.
mise à jour 04/2013: Domenicali est nommé Administrateur délégué de Ducati sous la direction du groupe Audi-VW
Domenicali, l’ancien PDG Minoli et Mengoli
C'est Filippo Preziosi, le créateur du V4 desmo 16, a longtemps été le directeur général et technique de "Ducati Corse".
Ce département qui emploie plus de 1000 personnes prend en charge entre autres activités la gestion sportive Moto GP, la recherche et le développement dans le domaine de la compétition ainsi que la construction des machines de GP et de Superbike. Pour que Ducati Corse puisse mieux se concentrer sur le programme Moto GP, la gestion sportive Superbike est désomais confiée à des teams satellites.
Né en 1968, Preziosi a couru en moto dans sa jeunesse et est entré chez Ducati en 1994. Il a été membre de la direction technique de 1994 et 1999, et durant cette période, il été notamment chargé de coordonner la conception de la culasse "Testastretta" et de la 1098. Il a été nommé directeur de "Ducati Corse" en 1999 pour superviser le retour de Ducati en GP programmé pour 2002.
En 2000 il a été victime d'un grave accident de moto qui l'a privé de l'usage de ses jambes et les premières esquisses du moteur V4 desmo ont été faites dans sa chambre d'hopital qui était devenue l'annexe du bureau d'études.
mise à jour 04/2013: Preziosi a démissionné après avoir été nommé directeur R&D fin 2012.
Gianluigi Mengoli a été intégré à la direction technique en 1994 lorsque Bordi devint directeur général.
Entré chez Ducati en 73 comme dessinateur au sein de la section Diesel, "Gigi" Mengoli né en 48 est le patriarche des ingénieurs de la maison, il est l’auteur de plus de 30 brevets. Il a participé avec Taglioni et Bordi à la création de tous les moteurs Ducati de l’ére "moderne", du Pantah aux 900SS à courroies crantées, en passant par le V4 bi-pantah qu’il a dessiné, les "desmoquattro" et le "Supermono".
Il a été nommé directeur technique production moteurs en 2007.
mise à jour 04/2013: Mengoli est parti à la retraite. Il est président honoraire de la fondation Ducati.
En 2012, après Taglioni et Bordi, ce sont Mengoli (machines de série) et Preziosi (département compétition) qui dirigeaient les départements conception moteurs, assistés par de jeunes ingénieurs de diverses nationalités qui viennent parfois de chez Ferrari.
Le président Minoli a beaucoup rajeuni le staff durant son passage. Gabriele Del Torchio (photo ci-dessous) occupait le poste de PDG de Ducati Motors secondé par quatre managers aux finances, à la production, aux investissements et aux ventes.
Mais lorsque Ducati a été racheté par Audi-VW Group et rattaché à Lamborghini en 2012, Gabriele Del Torchio a conservé son poste chez Ducati tout en étant nommé président du conseil d'administration de Lamborghini. Claudio Domenicali a pris la place directeur général de Ducati Motors tout en restant PDG de Ducati Corse.
(Mise à jour 04/2013: Del Torchio a été nommé PDG d'Alitalia)
Administrateur délégué Ducati Motors : Claudio Domenicali, ancien directeur général
Directeur général Ducati Corse : Bernhard Gobmeier (nouveau chez Ducati et ancien responsable du projet BMW Superbike)
Responsale du projet Moto GP Ducati : Paolo Ciabatti (ancien responsable du projet Ducati Superbike)
Filippo Preziosi (ancien responsale du projet Moto GP Ducati) qui avait été nommé (mis au placard) comme directeur R&D fin 2012, a démissionné début Mars 2013..
En 2014, Bernhard Gobmeier a été remercié, Gigi Dall'Igna occupe à présent le poste de directeur de Ducati Corse (photo ci-dessous)
Date de dernière mise à jour : 26/02/2024